Page 12 - Prologue
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— Peu m’importe, répliqua-t-elle d’une voix blanche.
— Ah oui ? Et vous pensez vraiment que votre père se remettra
facilement de sa trahison envers sa famille et son nom ? Permettez-
moi d’en douter.
Eleanor sentait l’étau se refermer lentement, inexorablement
autour d’elle. Elle savait qu’elle n’avait pas le choix et aucune
échappatoire. Ses yeux croisèrent alors ceux de son « fiancé ». Les
siens restèrent secs, sa vision nette. Elle n’allait pas lui donner le
plaisir de la voir brisée. Il pouvait bien lui retirer ses rêves, il ne lui
ôterait ni sa fierté, ni sa dignité. Pas aujourd’hui en tout cas.
Elle releva le menton et déclara :
— Très bien, j’accepte. Uniquement pour ma famille et mon père.
Sachez que je ne retirerai aucun plaisir à être votre femme.
Un lent sourire de triomphe étira les fines lèvres de Lord Grant.
— Parfait, je savais que vous sauriez vous montrer raisonnable. Que
les choses soient bien claires, Lady Eleanor. Une fois que vous
porterez mon nom, vous ne ferez rien sans mon aval et vous ne me
parlerez plus jamais sur le ton que vous venez d’employer. Votre vie
de petite princesse gâtée est terminée.
— Que ferez-vous dans le cas contraire, Monsieur ? Allez-vous me
frapper comme tous ces hommes qui compensent leur manque de
caractère par la force ?
— Allons, nous sommes à l’aube du vingtième siècle, nous ne
sommes plus des barbares. Il existe bien d’autres moyens de vous
soumettre.
Eleanor déglutit, essayant de ravaler sa rage et sa colère, les
poings serrés sur ses genoux. Elle se promit de lutter de toutes ses
forces, à chaque instant, pour ne pas devenir la poupée brisée de
cet homme.
— Quant au mariage, reprit-il, je m’occupe de tout. Vous n’aurez
qu’à vous présenter le jour J, à l’adresse que je vous indiquerai.
— N’aurais-je donc pas un droit de regard sur tout ceci ? Il s’agit
également de mon mariage, je vous le rappelle.
— Non, il va falloir vous y habituer.
— Laissez-moi au moins choisir ma robe de mariée !
Lord Grant réfléchit un instant.