Page 8 - Prologue
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Soudain, Pikins fit son entrée et déclara d’une voix forte, faisant
               sursauter la famille Egerton :
               — Lord Grant, Vos Grâces.
                   Le cœur d’Eleanor manqua un battement et elle blêmit.  Mais
               elle  se  força  à  garder  une  respiration  lente  et  calme.  Elle  ne  se
               retourna  pas  tout  de  suite,  préférant  gagner  du  temps  afin  de
               reprendre  contenance.  Elle  entendit  son  père  accueillir
               chaleureusement  leur  invité  et  présenter  sa  mère  au  nouvel
               arrivant.
               — Et voici ma fille, Lady Eleanor.
                   Le sort en était donc jeté. Elle devait faire preuve de courage et
               d’autant de détermination que son père semblait en montrer pour
               la marier. Elle serra les poings et se retourna, très lentement.
                   Elle dut prendre sur elle pour ne pas avoir un mouvement de
               recul quand l’homme que son père voulait la voir épouser s’avança
               vers elle.
                   Il  était  plus  âgé  que  le  duc  et  approchait  sans  doute  des
               soixante ans. Il était encore grand, mais affichait un tour de taille
               impressionnant.  Son  visage  avait  perdu  de  sa  fermeté  et  de
               nombreuses  rides  le  barraient.  Ses  yeux  bleus,  légèrement
               globuleux,  étaient  vifs  et  la  scrutaient  des  pieds  à  la  tête.  Ses
               cheveux, presque entièrement blancs, se faisaient déjà rares sur son
               front et étaient rejetés en arrière.
                   D’autorité, il prit la main de la jeune fille dans la sienne et la
               porta à ses lèvres flasques. Eleanor ne put s’empêcher de grimacer,
               ce qui n’échappa pas à Lord Grant qui lui sourit.
               — Je suis enchanté de faire votre connaissance, douce Eleanor.
               La jeune fille retira brusquement sa main de la sienne et réussit à
               articuler.
               — De même, Monsieur.
               —  Dites-moi,  votre  entrée  dans  le  monde  se  passe-t-elle  comme
               vous l’aviez imaginée ?
               — Absolument ! Je rencontre de nombreux jeunes hommes tout à
               fait charmants, répliqua-t-elle froidement, insistant volontairement
               sur le mot « jeunes ».
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