Page 159 - ANGOISSE
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Strasbourg – Bas-Rhin – 15 Juin – 19h44
La grande mosquée de Strasbourg, la seconde de France, avait fait le plein
de sa capacité, soit mille cinq cents fidèles venus pour le grand prêche du
cheikh Adji Namudin. Tous, sans l’avouer vraiment, étaient préoccupés par une
situation dont chacun avait bien pris conscience qu’elle ne faisait que
s’empirer. Les événements les plus alarmants étaient parvenus jusqu’à leurs
oreilles sans savoir véritablement comment réagir. Raison supplémentaire
pour laquelle chacun attendait avec impatience le grand prêche en espérant y
trouver les réponses qu’ils espéraient. Pour l’immense majorité d’entre eux
leur Islam ne pouvait se pratiquer que dans la paix d’Allah en bonne
intelligence avec la République qui les accueillait sur son territoire et dont ils
se devaient de respecter les règles dès lors qu’elles ne fussent pas en
contradiction totale avec leur foi. Toutefois quelques jeunes exprimaient plus
ou moins explicitement leur volonté de s’affranchir de cette terre nourricière
au besoin par la violence afin de mener le combat contre les infidèles.
Lorsque le cheikh prit place devant le pupitre un silence pesant régnait dans
les rangs des fidèles. Toutes les portes de la grande mosquée avaient été
fermées afin d’éviter toute intrusion et toute perturbation du grand prêche du
vendredi. Personne n’entendit donc le fracas provoqué par une foule d’une
centaine d’hommes qui se massaient maintenant devant l’entrée principale de
l’imposant bâtiment surmonté non d’un minaret comme cela avait été
initialement prévu mais d’un dôme majestueux. Cette masse indistincte
d’hommes en colère stoppa net, ne sachant plus vraiment que faire en
l’absence d’ordre donné. Celle-ci s’était formée spontanément dans les rues
de la vieille ville à l’annonce de l’explosion qui s’était déroulée dans la banlieue
lyonnaise avec comme seul objectif d’en découdre avec un maximum de
musulmans mais sans idée précise quant au sort qui leur serait réservé. Le seul
leitmotiv commun étant la vengeance. Sans idée véritablement formatée de la
limite de cet exercice. Certains d’entre eux portaient des barres de fer, des
manches de pioches tandis que d’autres, les plus nombreux, étaient venus
avec leurs seuls poings.
- Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? Cria un homme particulièrement agité.
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