Page 172 - L'Empreinte du temps
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Philippe rongeait son frein. Les heures s’écoulaient inexorables
avant que SOURIQUET ne sorte de prison et cela le désespérait de
savoir qu’un criminel tel que lui soit bientôt dehors. Libre. Il avait lu
et relu l’ensemble de la procédure en espérant pouvoir y trouver un
indice qu’ils auraient oublié, un détail qui pourrait encore être
exploité mais il avait fini par capituler. Sa première enquête
criminelle serait donc un échec, un fiasco total alors qu’ils
connaissaient parfaitement l’auteur, son mode opératoire sans
pouvoir toutefois l’exprimer, le consigner dans un procès-verbal au
seul motif que la sacro-sainte science régnant en maître depuis plus
de deux siècles avait banni tout ce qui ne relevait pas des lois de la
nature ou d’un système d’explication rationnel. Cette science qui
avait fini par supplanter le pouvoir spirituel et son intransigeance
pour le remplacer par ce nouveau pouvoir et son intolérance.
Le jeune gardien décida d’aller faire un tour pour se changer les
idées, histoire également d’aller saluer quelques collègues qu’il
appréciait particulièrement. De toute manière il ne tenait plus en
place et s’il ne l’avait accompli de sa propre volonté, Clarice n’aurait
pas tardé de l’inviter à changer d’air durant quelques minutes. Il se
rendit jusqu’au poste à l’accueil. La gare de triage comme l’appelaient
certains. Le lieu où l’on pouvait indifféremment trouver des
personnes venues pour témoigner, ceux qui étaient convoqués mais
surtout des plaignants aussi bien pour de véritables infractions
pénales que le plus souvent pour exposer leurs griefs à l’égard d’un
voisin, de son conjoint, de celui ou celle qui leur avait vendu un
matériel qui ne fonctionnait pas, transformant pour ces derniers le
commissariat en véritable annexe de l’assistance sociale ou en
bureau des pleurs. Le rôle ingrat du policier en poste à l’accueil était
de faire le tri le plus rapidement possible afin d’éviter d’embouteiller
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