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Femi Okiremuete Shaka / La politique de conversion culturelle   99

         est montrée sous la forme d'une reprise et d'une célébration des raids d'es-
          claves, d'un homme grimpant rapidement et à mains nues sur un grand co-
          cotier,  et d'animaux  entrant et  sortant de  l'eau, comme  pour célébrer
          joyeusement l'absence de loi dans la rivière. Bien que toute la séquence soit
          structurée pour signifier un retour à l'ancien régime de la justice de la jungle,
          elle a fini par dépeindre, par inadvertance, la fragilité de la domination co-
          loniale britannique en exploitant la potentialité d'une telle rechute.

                   En conclusion, bien que Sanders of the River ne soit pas le pre-
          mier film à instaurer les conventions du cinéma africain colonialiste, cette
          tradition ayant été initiée par la série de films sur la jungle de Tarzan, il ne
          fait aucun doute qu'il s'impose aujourd'hui comme un exemple classique du
          sous-genre de films qu'il a inauguré, les films à charge coloniale. Ces films
          propagent la nécessité de la domination coloniale. Cependant, leurs tenta-
          tives de refléter les contradictions des sociétés coloniales démentent souvent
         ce message, exposant ainsi la fragilité de l'ensemble du projet. Cela devient
         à la fois une lamentation et une reconnaissance du fardeau de la domination
          coloniale. Ce schéma textuel peut être observé dans Sanders of the River,
          Men of Two Worlds, Mister Johnson, etc., où les tentatives de dépeindre le
          jeu de pouvoir des sociétés coloniales et la rationalisation du colonialisme
          aboutissent à l'exposition de la fragilité de l'ensemble du système.

                   Femi Okiremuete Shaka a étudié dans les universités du
                   Bénin et d'Ibadan au Nigeria et a obtenu un Doctorat en études
                   cinéma tographiques à l'université de Warwick en tant que
                   boursier du Commonwealth. Il a également été Visiting
                   Fulbright African Se nior Scholar dans le programme d'études
                   africaines de l'université de New York. Il enseigne actuellement
                   les études cinématogra phiques et télévisuelles à l'université de
                   Port Harcourt, au Nigeria.



          notes :
          Publié à l'origine sous le titre Femi Okiremuete Shaka, « The Politics of Cultural Conversion in Co-
          lonialist African Cinema », Cineaction, 37 (janvier 1995) : 50-67.
          1. Robert Stam et Louise Spence, « Colonialism, Racism and Representation : An Introduction
          »,  Screen Vol. 24, No. 2 (mars-avril 1983), p. 3.
          2. Peter Noble, The Negro in Films (Londres : Robinson, 1948), pp. 11-12.
         3. LA. Notcutt et G.C. Latham, The African and the Cinema (Londres : The Edinburgh House Press,
         1937), pp. 22-23.
         4. Cité dans Manthia Diawara, «Sub-Saharan Film Production : Technological Paternalism», Jump
         Cut (n° 32, avril 1986), p. 64.
         5. Ibid, p. 64.
         6. Ibid, p. 62.
         7. Onyero Mgbejume, Film in Nigeria : Development, Problems and Promise (Nairobi : African
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