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Odile Goerg / La génération des indépendances 167
Photo 4. Une séance de cinéma à Niono, au Mali, en mars 1957 : Image reproduite avec l'aimable au-
torisation de l'auteur, Jean-Paul Sivadier.
lière car - ils seraient inexpérimentés ou ignorants, ne doit-on pas s’étonner
de la totale méconnaissance, par les producteurs et distributeurs, des socié-
tés africaines et de leurs désirs? Cette position est développée en 1957 par
le Nigérian J. Koyinde Vaughan dans Présence Africaine, tribune des in-
tellectuels et des artistes : «Outre la préoccupation pour ce faux exotisme,
il existe une autre attitude envers l'Afrique, une attitude bien plus répandue
en Grande-Bretagne. C'est l’idée que les Africains devraient être guidés,
encouragés et gouvernés » .
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De même, le cinéaste Paulin Vieyra ironise : «Beaucoup de lieux
communs ont été prononcés sur les Africains […]. On a dit aussi qu’il fallait
adapter le cinéma à la compréhension des Africains ; je trouve cette solli-
citude à notre égard très touchante. Mais je rappellerai simplement que
lorsque le cinéma a débuté en Europe, personne ne s’est préoccupé de savoir
si les gens en comprenaient la technique » .
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Ces réflexions nourrissent le cinéma qui nait après les indépen-
dances, autant pour le cadre institutionnel que dans les prises de position
des premiers cinéastes. Les maîtres-mots sont militantisme et perspective
patriotique, éducation et contrôle.