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Femi Okiremuete Shaka / La politique de conversion culturelle   89

          glissement des africains vers la barbarie en l'absence d'autorité coloniale.
          La stratégie consiste bien sûr à rationaliser la présence coloniale, mais c'est
          une stratégie qui expose aussi par inadvertance la fragilité de la domination
          coloniale. On peut entrevoir des preuves de ce schéma textuel dans Sanders
          of the Rivers, Four Feathers, ou Bones of the River, Men of Two Worlds,
          Mister Johnson, etc. Ce modèle deviendra plus clair dans mon analyse de
          Sanders of the River.

          Une lecture critique de Sanders of the River

                   Parmi les films que j'ai classés dans la catégorie des films à fardeau
          coloniale, Sanders of the River, la version cinématographique de Zoltán
          Korda du livre de contes populaire du même titre d'Edgar Wallace, peut au-
          jourd'hui être considéré comme un classique du sous-genre. Sanders of the
          River a été conçu par son producteur, Alexander Korda, le frère aîné du réa-
          lisateur, comme faisant partie d'une trilogie impériale comprenant également
          The Drum et The Four Feathers (de Zoltán Korda, 1938 et 1939, Royaume-
          Uni). L'un de ces trois films, se déroule hors d'Afrique, en Inde.


                   La réputation de Sanders of the river s'explique en grande partie
         par le fait qu'il s'agit de l'un des tout premiers films de ce sous-genre de
         films africains colonialistes à traiter d'un sujet aussi pertinent sur le plan his-
         torique que les problèmes potentiels d'un administrateur colonial archétypal
         à une époque où les britanniques avaient commencé à administrer l'Afrique.
         Son succès peut également être attribué à l'utilisation élaborée de sculptures
         artistiques Yoruba comme objets de décoration scénique, à la fois dans le bu-
         reau du commissaire Sander à la cour de Mofalaba et dans l'habitation privée
         de Bosambo, ainsi qu'à l'utilisation de chants et de danses de fertilité érotiques
         africains dans la séquence traitant du mariage de Bosambo et de Lilongo.
         Tous ces éléments se combinent pour satisfaire les besoins de divertissement
         d'un large éventail de spectateurs. Le film est réputé avoir eu un tel succès
         qu'après son exploitation en 1935, il a été réédité en 1938, 1943 et 1947. Une
         version scénique, The Sun Never Sets, qui mettait également en vedette Leslie
         Banks, a été inspirée par le film. L'enregistrement de Canoe Song par Paul
         Robeson  est  également  devenu  un  succès  discographique.  Richards  et
         Aldgate affirment également que « le succès au box-office de Sanders fut tel
         qu'il inspira Korda à produire The Drum, dont l'action se déroule en Inde, et
         The  Four  Feathers,  dont  l'action  se  déroule  au  Soudan   50   ».  Le  film
         commence avec  le  commissaire  Sanders  (Leslie  Banks),  qui  a  dirigé
         pacifiquement un ensemble de communautés sur les estuaires d'un fleuve
         en  Afrique  de l'Ouest pendant plusieurs années sans congé, se préparant à
         partir en congé annuel pour lui permettre de finaliser ses projets de mariage.
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