Page 174 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE ET SES JOURS INTRANQUILLES_Neat
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LE TRIANGLE D’OR





                   Avec cette ascension dans ma vie professionnelle, toutes les portes me
              semblaient s’ouvrir soudainement plus facilement. Alors, je continuais à
              réaliser des dessins de tissus non seulement pour Guy Laroche, mais en free-
              lance parallèlement. Je les proposais aux fabricants et fournisseurs de tissus de
              luxe et haute-couture, et notamment ceux situés dans le quartier du Triangle
              d’Or.

                   C’est ainsi qu’un jour j’avais contacté un fournisseur situé dans une rue
              parallèle à l’avenue Montaigne, rue Marbeuf me semble-il, et escaladant
              l’escalier pour m’y rendre, je croisais le comédien danseur de claquettes, Jean-

              Pierre Cassel qui eut un air tellement surpris que je le fus plus encore. J’avais
              probablement attiré son attention par cette tenue vintage et élégante que je
              portais, n’aidant pas à passer inaperçue. Il sortait probablement du bureau d’un
              producteur, ou d’un agent artistique. Puis en m’adressant un large sourire, il
              continua sa descente d’escalier tout en restant fixé sur moi, et patatra !!! C‘est là
              qu’il se cassa la figure dans l’escalier. J’étais tellement confuse que je continuais
              à gravir les marches de l’escalier simulant une certaine indifférence par honte
              de ce que je venais de provoquer.

                   Quelques décennies plus tard, alors que je tenais un petit restaurant où
              j’élaborais la cuisine, Vincent son fils, célèbre comédien lui aussi, était venu se
              restaurer à plusieurs reprises, me remerciant des plats qu’il avait appréciés, je
              repensais à son père, mais je m’étais bien gardée de lui raconter cette anecdote.

                   Un jour où M. Laroche m’avait un peu vexée, me demandant de ramasser
              les épingles dispersées sur le podium, acte que j’aurais très bien pu accomplir

              évidemment, mais avec mon statut de « privilégiée », il me semblait que cette
              tâche ne figurait pas dans mes attributions. Furieuse et pour me consoler,
              j’avais décidé de me rendre chez un couturier voisin et vendre quelques-uns de
              mes dessins. Ce concurrent était situé sur le même trottoir de l’avenue
              Montaigne.






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