Page 177 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE ET SES JOURS INTRANQUILLES_Neat
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Pour le déjeuner, je fus accueillie au restaurant, telle une cliente
privilégiée, et confortablement installée par le maître d’hôtel qui me tendit la
carte des spécialités. Je me réjouissais déjà à l’idée de me régaler de ces
délicieux plats proposés. Ce ne fut pas le cas, puisque pendant tout le déjeuner,
deux chefs de rang et le sommelier étaient plantés à mes côtés, observant les
moindres de mes faits et gestes afin d’être le plus attentifs possible pour
soigner le service. Cette situation me mis mal à l’aise, et j’avoue qu’après une
nuit passée dans un train, j’aurait volontiers apprécié ce délicat repas, seule,
sans être dérangée. Je quittais donc la table souriante et courtoise tout en me
disant qu’on ne m’y reprendrait plus.
Il fallait ensuite s’occuper de l’organisation de la collection pour le défilé
qui avait lieu dans l’après-midi, et tout se déroula sans problème. Je n’étais pas
trop satisfaite du passage des filles, mais il est vrai qu’il n’y avait eu aucune
répétition, et qu’on était loin des défilés parisiens. Le succès fut néanmoins au
rendez-vous. J’en informais mon employeur.
Je terminais la soirée seule, comme je le souhaitais, dans un restaurant
situé sur la Croisette, avant une bonne nuit de sommeil réparateur, afin
d’organiser un nouveau défilé qui devait se dérouler au Palm Beach qui fut très
applaudi. Cette seconde soirée se déroula en invitée chez les gérants de la
boutique Laroche qui me posaient mille questions sur la maison mère et son
couturier, je restais néanmoins très réservée à ce sujet.
Cette petite aventure cannoise semblait réussie, excepté les deux nuits
passées dans ce bel établissement de Cannes qui me laissèrent un souvenir
amer. J’avais été invitée et très bien accueillie dans ce palace, et on m’avait
réservé une magnifique chambre, où je passais deux nuits blanches, car la
chambre qui m’était attribuée donnait sur la ligne de chemin de fer où les trains
de la gare de Cannes passaient régulièrement. Néanmoins, je n’avais pas osé
m’en plaindre à la direction.
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