Page 252 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE ET SES JOURS INTRANQUILLES_Neat
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LE VOYAGE A ZURICH
Après ce voyage au Lac de Côme, j’allais retrouver mon employeur pour
une sélection des tissus de la Maison Abraham dont le siège si situait à Zurich.
Monsieur Zumsteg, propriétaire de la marque, était représenté à Paris, rue du
Faubourg Saint Honoré, et collaborait déjà depuis plusieurs années avec Yves
Saint Laurent pour ses créations et exclusivités textiles. J’avais d’ailleurs
entendu une version des allers retours, Paris Marrakech pour aller présenter
un échantillon de tissu au créateur se ressourçant dans sa villa, loin de Paris,
cela m’avait sidérée, mais vu la notoriété du créateur il fallait l’accepter.
Madame Piot, notre nouvelle directrice, usant de tous les stratagèmes
pour me décourager, dans l’espoir de me voir bientôt démissionner, avait fait
réserver un billet de train de seconde classe à mon attention, peu m’importait
qu’il soit de seconde classe, mais l’heure du départ était prévue à sept heures le
matin, Gare de l’Est-ce qui me dérangeais. Je partais donc le ventre vide. De
plus, je voyageais dans un véritable tortillard, qui arriva en gare de Zurich, vers
treize heures, il n’y avait aucun service de restauration à bord du train.
Néanmoins il en fallait bien plus pour me décourager puisque pour collaborer
avec la Vicomtesse, il fallait avoir les reins solides et une sacrée dose de self-
control.
A mon arrivée à Zurich, Serge, le représentant de Paris m’attendait sur le
quai. Je cherchais une boutique pour m’alimenter, lui expliquant que j’étais à
jeûn depuis la veille, mais tout était fermé pendant l’heure du déjeuner, et
j’arrivais chez Abraham à l’heure prévue pour le rendez-vous. Serge me
présenta M. Zumsteg accompagné de la Vicomtesse, et se proposa de me servir
un café. La réaction de mon employeur ne se fit pas attendre devant cette
délicate attention à mon égard puisqu’elle souhaitait se faire servir un café en
priorité, moi je pouvais bien attendre, je n’étais que sa subalterne. Je lui
expliquai mon jeûne involontaire ce qui la calma, d’autant plus qu’elle venait de
déjeuner avec M. Zumsteg dans son magnifique restaurant.
Comme de coutume, elle avait passé près de quatre heures à faire et refaire
la collection en proposant de changer les matières, les imprimés ou les coloris
sur tel ou tel support, mais n’avait toujours rien commandé, et l’heure de son
vol de retour pour Paris approchait. M. Zumsteg se leva et ordonna au
chauffeur d’avancer la Rolls Blanche pour nous accompagner à l’aéroport.
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