Page 255 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE ET SES JOURS INTRANQUILLES_Neat
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L’ABSENCE IMPRÉVUE
Avec cette attitude à mon égard, et le peu de respect qu’elle m’accordait
ma conscience professionnelle passa définitivement au second plan. Ce job était
d’ailleurs un sacrifice sur ma vie privée, sans oublier les nombreuses heures
supplémentaires effectuées régulièrement, alors j’en étais arrivée à me rebeller
gentiment. A chaque remarque je lui rappelai que malgré mes responsabilités,
le statut de cadre ne m’avait jamais été accordé, et mes heures supplémentaires
représentaient des frais de nourrice importants pour la garde de ma petite fille.
Chaque fois, elle me répondait d’aller voir Madame PIOT, la directrice pour
tenter de régulariser cette situation. Paradoxalement, Madame Piot s’en
délectait et attendait impatiemment ma démission. Aussi se réjouissait-elle en
m’annonçant un refus catégorique de la régularisation de ma situation, en
ajoutant que tout était désormais linéaire pour moi, sans espoir d’aucune
promotion.
À ce stade, j’aurais été en droit d’aller me plaindre à l’inspection du travail,
mais je ne souhaitais pas entrer en arriver là, mais c’est à partir de cette
période que je décidais de quitter mon job à 18 heures précises désormais, et
chaque fois la Vicomtesse me rappelait que nous n’étions pas dans un
ministère, mais je résistais et restais sur ma position, malgré toutes ces
embûches intentionnelles, jusqu’au jour où l’affaire arriva à son paroxysme.
Il y avait eu une période où mon job passait avant ma santé et j’allais en
payer les conséquences. Je souffrais depuis quelques temps déjà mais je me
négligeais en oubliant ce qui me faisait pourtant souffrir, jusqu’au jour où je
m’évanouis sur le carreau du perron de l’hôtel particulier. Je décidais alors
d’appeler mon chirurgien, puisqu’il possédait déjà un dossier médical bien
conséquent à mon sujet. Avec les quelques explications fournies, il me donna
rendez-vous d’urgence dès le lendemain fin d’après-midi et je fus aussitôt
hospitalisée.
Après examen approfondi et la pratique d’une cœlioscopie, le chirurgien
m’annonça le pire. J’allais devoir passer en salle d’opération pour une grave
intervention, et nous étions en pleine période de collection. Je n’imaginais pas
qu’à peine âgée de 36 ans, il me fallait subir une ablation qui touchait ma
féminité. Il se justifia m’expliquant que j’avais la chance d’avoir ma fille parce
qu’il n’y aurait plus jamais d’autre enfant, c’était irrémédiable.
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