Page 249 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE ET SES JOURS INTRANQUILLES_Neat
P. 249

LE TRIO INFERNAL






                        C’était une saison printanière où nous devions une fois de plus nous
              rendre à Milan et au Lac de Côme. J’ignorai que M. Gamrasni, « la mouche du
              coche » allait nous accompagner, je l’appris la veille du départ. La Vicomtesse
              m’en avait informée me demandant conseil sur ce que nous pouvions proposer
              à M. Gamrasni pendant nos interminables sélections de tissus. Je lui suggérai de
              l’envoyer en ville à la recherche de spécialités régionales pendant nos activités
              professionnelles. Cette idée l’amusa beaucoup, mais j’ignore si elles avaient été
              mises en pratique, voyant M. Gamrasni rentrer les mains vides après chacun de
              nos rendez-vous avec les fournisseurs.

                        Nous venions d’arriver à l’hôtel réservé à Milan, lorsque la Vicomtesse se

              précipita à la réception, s’annonçant à voix haute afin de lui préciser si sa
              chambre comportait bien une porte communicante avec celle de M. Gamrasni.
              Celui-ci, parut très confus en me regardant, et baissa la tête. Quant à moi, je
              savais, même si je n’étais pas censée savoir ce que toute le monde savait, mais
              je feignais ne pas savoir en consultant les dépliants de la réception.

                        Le problème fut très vite résolu pour moi, puisque la chambre qui m’avait
              été réservée par la secrétaire particulière, se situait à l’étage en dessous.
              Malheureusement, le hasard voulut que ma chambre soit juste en dessous de la
              chambre de la Vicomtesse, et durant la nuit il y eut des éclats de voix
              incessants, ce qui m’avait empêché de dormir. Le lendemain matin mon
              employeur me demanda si j’avais passé une bonne nuit, ajoutant que ce n’était
              pas son cas prétextant une réunion tardive avec M. Gamrasni. Je lui répondis
              que moi non plus je n’avais pas fermé l’œil de la nuit, improvisant un couple
              imaginaire, voisin de ma chambre qui s’était chamaillé toute la nuit.


                        En fin de matinée, nous avions pris la direction du Lac de Côme, M.
              Gamrasni nous accompagnait, ils avaient pris place à l’arrière de la limousine,
              j’étais assise à côté du chauffeur. Ils ne cessaient de discuter à voix haute en
              anglais, ce qui annonçait qu’ils se chamaillaient. Bien que bilingue et afin de
              faire diversion, je feignais ne pas comprendre tout en contemplant le paysage,
              béate d’admiration. Je savais que dès que la conversation virait en anglais,
              c’était la discorde du couple et je n’étais pas censée comprendre leur
              discussion. J’avoue que dans ce domaine j’étais devenue totalement experte en
              improvisation.


                                                                                                         248
   244   245   246   247   248   249   250   251   252   253   254