Page 124 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France Le chanvre indien, devenu tellement français
que la représentation nationale érige enfin en délit la conduite
sous l’empire du cannabis et la condamne. Dans le bêtisier qui
fleurissait alors, il me revient en mémoire une sottise proférée par
un « scientifique » (Jean-Pol Tassin); il affirmait que le fumeur
de cannabis, conscient des modifications de son état, était plus
prudent au volant que quiconque. Ce type de discours fut relayé,
on l’a dit, par un Premier ministre, candidat au grade du dessus
(Lionel Jospin), déclarant, en pleine campagne électorale pour
accéder à la magistrature suprême, qu’il valait mieux avoir fumé
un joint que bu de l’alcool avant de prendre le volant.
L’étude « Stupéfiants et Accidents Mortels de la route » (SAM),
confirma les résultats d’un programme national hospitalier de
recherche clinique (PHRC) qui avait été contesté, en dépit du fait
qu’il associait les meilleurs toxicologues hospitaliers français (les
docteurs Jean-Pierre Goullé, Patrick Mura, Pascal Kintz...), mais
ses résultats dérangeaient. Il fallut ces études pour que le danger
de la conduite sous cannabis, auquel tout portait à croire, soit enfin
reconnu. Depuis lors il n’a cessé, hélas, d’être confirmé.
Les chantres du cannabis ont aussi contesté la notion
d’escalade vers d’autres drogues. Pourtant, au rythme où
s’atténuent les effets ressentis par le consommateur de cannabis
(par le jeu d’une tolérance), s’éveille une forte incitation à
recourir à d’autres drogues. Un scientifique (Bernard Roques)
fut missionné pour contester avec force cette escalade. Il avait
pourtant co-signé auparavant une publication (dans la prestigieuse
revue internationale Science) montrant que des souris privées
par manipulation génétique des cibles de l’action du THC, les
récepteurs CB , non seulement ne s’auto-administraient plus
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de morphine (exprimant qu’elles avaient perdu leur appétence
naturelle pour celle-ci), mais de surcroît ne développaient qu’à
un faible niveau une dépendance physique, c’est-à-dire un
syndrome d’abstinence à l’arrêt d’une administration chronique
de fortes doses de morphine. Dans une émission radiophonique
où nous étions opposés, alors que je lui rappelais ces résultats très
importants, dont il était co-signataire, il crut pouvoir s’en sortir en
déclarant que ce qui est observé expérimentalement chez l’animal
n’a pas vocation à être transposé à l’Homme. Je lui demandais
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