Page 127 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France Le chanvre indien, devenu tellement français
public. Cette relation était si grave et, partant, si incompatible
avec sa légalisation, qu’elle devait être absolument occultée. Que
d’infortunés parents déplorent cette occultation, maintenant qu’ils
doivent vivre avec le drame de la psychose et parfois du deuil
d’un de leurs enfants. Ils regrettent amèrement de ne pas avoir
été avertis de ce facteur de risque ; ce qui leur aurait permis de
peser de toute leur force éducative contre ce fléau. Pourtant cette
relation était écrite depuis 1853, dans le livre que Jacques-Joseph
Moreau (dit Moreau de Tours) avait intitulé « Du haschisch et de
l’aliénation mentale ». Comment, d’ailleurs, a-t-on pu s’étonner
qu’une drogue induisant intrinsèquement délire et hallucinations
ne décompense une vulnérabilité à développer la schizophrénie ;
n’aggrave son évolution ; n’induise une résistance aux traitements
qu’on lui oppose ; ne joue un rôle important dans l’émergence
chez les psychotiques de comportements agressifs ; alors que les
délires et les hallucinations sont des manifestations constitutives
de la schizophrénie. Que de temps il a fallu pour constater l’énorme
surreprésentation des consommateurs de cannabis parmi les
psychotiques. Livrons le florilège de quelques-unes des arguties
qui furent développées :
Il fut prétendu que l’usage du cannabis pouvait avoir un
caractère thérapeutique chez le schizophrène, d’où cette folie
(si j’ose dire) de ne pas empêcher les victimes de cette affection
d’en consommer. Je me suis affronté à plusieurs psychiatres
qui, excipant du droit au plaisir de leurs patients, les laissaient
poursuivre leur consommation. Il fut aussi prétendu que la drogue
constituait un moyen de socialisation du patient, puisqu’elle
l’incitait à sortir de son isolement pour aller à la rencontre de
ses fournisseurs… Quand les données ont rendu irréfragables
ces liaisons dangereuses entre le cannabis et la schizophrénie, au
lieu d’en faire, enfin, un des éléments forts d’une pédagogie axée
sur la prévention, le discours devint « d’accord, mais pas chez
tous les utilisateurs ». Bien sûr ! évidemment ! C’est comme si
la prévention routière, au lieu de dissuader de franchir la ligne
continue au sommet des côtes, soulignait que l’on n’est, somme
toute, que rarement confronté à une automobile venant en face.
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