Page 311 - Traité de Chimie Thérapeutique 2 : Médicaments Antibiotiques
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8. LES ANTIBIOTIQUES AMINOSIDIQUES                              301


                    Cette toxicité touche particulièrement des sujets prédisposés (âgés, insuffi-
                 sants rénaux, sensibilisation antérieure aux aminosides) mais elle peut atteindre
                 tout autre malade recevant ces antibiotiques pour la première fois. Elle est poten-
                 tialisée par certaines associations médicamenteuses.
                    La néphrotoxicité est due à une capture sélective des aminosides au niveau
                 de la membrane de la partie apicale des cellules en brosse du tubule proximal.
                 Le rapport C rein/C plasma élevé ( ex. 11 pour l'amikacine, 20 pour la gentami-
                 cine) suggère un transport actif dans les cellules. Dans un premier temps, il y a
                 fixation sur les phospholipides membranaires polarisés négativement, en fonction
                 de la charge cationique des aminosides, et avec échange contre des ions Ca + +.
                 Il y a ensuite internalisation et translocation dans les lysosomes à contenu acide,
                 où le complexe phospholipide-aminoside s'accumule. La production d'inositol-
                 triphosphate est d'autre part entravée. Le phénomène est lentement réversible
                 (t1/2 = 100-400 h) et souvent cliniquement silencieux. mais il peut aussi en résul-
                 ter une nécrose du tubule proximal ( 5 % des cas) due à une désorganisation des
                 lysosomes, suivie d'une libération de l'aminoside dans le cytoplasme. On observe
                 alors une diminution de la filtration glomérulaire sans oligurie. La lésion peut encore
                 régresser à l'arrêt du traitement, mais aussi évoluer vers l'insuffisance rénale, notam-
                 ment si l'administration de l'antibiotique se prolonge.
                    l'atteinte cochléovestibulaire résulte d'un passage dans la périlymphe et d'une
                 fixation sélective sur les cellules ciliées ( organe de Corti) particulièrement récep-
                 tives aux aminosides. Bien que le risque en soit augmenté en cas d'insuffisance
                 rénale, cette toxicité ne semble pas être reliée significativement à la concentra-
                 tion plasmatique en antibiotique. Elle résulte certainement d'un processus actif
                 d'accumulation cellulaire. L'ototoxicité se manifeste de façon irréversible au bout
                 de 8-10 jours. L'atteinte vestibulaire (vertiges, bourdonnements) précède l'atteinte
                 cochléaire ( surdité inappareillable ). On observe des variations relatives des ces
                 différents effets d'un produit à l'autre mais l'incidence globale en est élevée
                 (jusqu'à 1/3 des sujets traités). Ainsi, le tropisme est-il essentiellement vestibu-
                 laire pour la streptomycine, cochléaire pour l'amikacine et mixte pour la gentami-
                 cine, la tobramycine et la dibékacine. La ntilmicine apparaît relativement moins
                 toxique.

                 1.7.2. Autres effets indésirables

                 1 ) La structure des aminosides peut en faire des haptènes susceptibles de déclen-
                 cher des réactions de sensibilisation allergique, notamment cutanées, chez cer-
                 tains sujets ou le personnel soignant. En fait cette incidence apparait très limitée
                 sauf avec la streptomycine.
                 2) Les troubles sanguins sont rarissimes.

                 1.7.3. Interactions médicamenteuses

                 Les aminosides administrés par voie parentérale, donnent lieu à des accidents
                 en présence de plusieurs autres médicaments :
                 - les aminosides eux-mêmes : ils sont incompatibles en raison de leur synergie
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