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LA NEUROERgONOMIE POUR L’ÉCONOMIE DE LA CONNAISSANCE
                  la mobilisation collective des At d’un bien plus grand nombre de
                  gens, pourtant moins qualifiés.
                    Si l’on construisait des Atlaser (ou lasers d’At), nous pourrions
                  concentrer d’énormes volumes d’attention et de temps coordonnés,
                  qui résonneraient d’une façon positive sur un problème donné.
                  Ces Atlaser seraient des éléments essentiels de l’économie de la
                  connaissance et de la géopolitique des savoirs. Bien plus efficaces
                  scientifiquement, mais aussi moins chers que des accélérateurs de
                  particules, ils permettraient de concentrer ponctuellement ou dura‑
                  blement l’attention et le temps de la population sur des problèmes
                  précis, créant une immense valeur économique.
                    Quiconque prototypera et mettra en œuvre de tels Atlaser chan‑
                  gera le monde.
                    Depuis sa mise au point à la fin des années 1980, le modeste
                  protocole de transfert hypertexte (le célèbre http), imaginé au
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                  CERN  par Tim Berners‑ Lee, a fait bien plus pour la science mon‑
                  diale que le CERN lui‑ même, pourtant infiniment plus nanti en
                  investissements publics. Alors, si l’unité fondamentale du pouvoir
                  d’achat dans l’économie de la connaissance est bien l’At, c’est de
                  l’At avant tout qu’il faut dépenser, car il est plus important pour la
                  recherche que l’argent lui‑ même. En aucun cas on ne doit réserver
                  les dépenses d’At à une élite. Nous devons, au contraire, encoura‑
                  ger la dépense d’At comme dépense publique décentralisée mais
                  canalisée vers des objectifs scientifiques.
                    L’émerveillement est un moteur précieux dans l’économie de
                  la connaissance. Il l’est aussi bien dans la recherche que dans
                  l’apprentissage, et ces quelques personnes qui se font une fierté
                  d’avoir castré leur émerveillement, cette caste qui s’imagine que
                  le professionnel ne s’émerveille plus et qui le fait comprendre
                  par son cynisme à l’égard de ses pairs ou des nouveaux entrants
                  dans son métier, elle est heureusement en voie d’extinction. Il
                  faut encourager l’émerveillement, et s’il y a bien un pays qui,
                  aujourd’hui, investit délibérément dans l’émerveillement scien‑
                  tifique, ce sont les États‑ Unis. La France semble trouver l’émer‑
                  veillement scientifique vulgaire, non professionnel et hors de
                  propos. Je n’ai, pour ma part, aucun complexe à encourager le


                    1.  Centre européen de recherche nucléaire.

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