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NEURONAISSANCE
                  natifs digitaux, ces enfants qui expérimentent les réseaux sociaux
                  dès leur naissance, ou même avant, quand leurs parents publient
                  leurs clichés d’échographie, par exemple.
                    •  Le socialome, ou l’ensemble de nos interactions sociales et
                  l’ensemble de ce que les autres ont exprimé ou informé de nous
                  (il  est  particulièrement  prisé  du  renseignement,  de  la  police,  du
                  fichage et du contrespionnage).
                    •  L’allergome, ou même le sémiome, c’est‑ à‑ dire l’ensemble de nos
                  symptômes, ces signes par lesquels il est possible de  diagnostiquer
                  une maladie.


                    L’émergence des « ‑ omics » (connectomique, noomique, navi‑
                  gomique, datasomique, génomique, etc.) est prometteuse pour la
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                  « médecine stigmergique  », car elle pourra s’en servir afin d’amé‑
                  liorer sa précision diagnostique et pronostique. Il existe des par‑
                  cours de symptômes, qui peuvent être étudiés par analyse statistique
                  conditionnelle : sachant que tel patient fume, quelle est sa pro‑
                  babilité de développer un cancer du poumon ? ; sachant que tel
                  patient a eu tel et tel symptôme, quelle est sa probabilité d’évoluer
                  vers telle ou telle maladie ? Si nous possédons de vastes datasomes,
                  nous pouvons envisager de poser des pronostics avec beaucoup de
                  fiabilité, et parfois découvrir de nouvelles relations, inattendues,
                  entre certaines pathologies et certains modes de vie. De la même
                  manière, les technologies du data mining et du knowledge mining
                  permettent d’extraire de la connaissance inattendue de grands lots
                  de données, contrairement aux tests statistiques qui ne peuvent
                  faire émerger qu’une connaissance attendue.
                    Mais dans tout cela, qui sert qui ? D’un point de vue moral, il
                  est absolument nécessaire de faire en sorte qu’on ne puisse remon‑
                  ter de ces données à leur émetteur sans son autorisation expresse,
                  car elles relèvent de son intimité, et quiconque s’immisce dans
                  l’intimité de quelqu’un le corrompt. Bien qu’il soit violé avec une
                  régularité d’horloger par toutes les agences de renseignement au
                  monde, la NSA en tête, l’article 12 de la Déclaration universelle
                  des droits de l’homme est très clair sur ce sujet : « Nul ne sera
                  l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son


                    1.  Sur la stygmergie, cf. p. 102.

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