Page 64 - J'aime autant te hair
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soit de la race des brutes. Il doit surement avoir erreur sur la personne. La
lune est déjà montée au ciel et ses ombres se répandent sur la ville.
Charles a les mains recouvertes de sang, je peux voir à la façon dont il se
sert d’un mouchoir pour les nettoyer. Je n’en reviens toujours pas.
Stupéfaite comme jamais auparavant, un rideau se déchire devant moi, un
univers s’écroule sous mes pieds.
Je crois que…
Je crois que Charles vient de lever les yeux vers mon appartement.
En l’espace de trois secondes mon âme a failli quitter mon corps. Je tire
les rideaux et me cache dans un angle précis juste derrière la fenêtre.
Comment a-t-il pu deviner que j’étais là ? Pourtant toutes les lumières de
la maison sont éteintes et je me tiens à plus de sept mètres du sol. Il m’a
vu j’en suis certaine. Je l’ai remarqué, une fois que Charles a froncé les
sourcils. Quand j’essaie discrètement de jeter un coup d’œil à la rue,
Charles a déjà disparu. Va-t-il me donner la chasse, il semblerait qu’il soit
un voyou et d’après ce que je sais, ces gens-là ont toujours tendance à
éliminer les témoins. De vrais rancuniers. La perspective de mourir sous
les coups de Charles m’arrache un couinement, je m’effondre, dos contre
mur et me laisse glisser jusqu’au sol. Recroquevillée sur moi-même, je
n’ai plus vraiment la force de pleurer.
Ce matin au réveil Dan n’est plus dans son lit, tout petit déjà il ne
dormait que très peu. La chambre d’ami est vide, alors je vais vérifier
dans la salle de bain. Non plus. Une note est collée à la porte du
réfrigérateur, avec un gros aimant en forme de grenouille :
Helena
Merci pour l’hospitalité de cette nuit, surtout ne te fais pas de
mauvais sang, je vais bien. On a du travail ce matin et comme tu dormais
encore, je n’ai pas voulu te déranger.
Je t’aime,
Ton frère adoré.
Au moins il a eu l’amabilité de me rédiger une note, sans trop faire
de fautes d’orthographe. Dan a toute ma reconnaissance. Je quitte la
cuisine pour mettre un peu d’ordre dans la maison : vêtements au sol,
serviettes éparses, vaisselle dans l’évier, literie défaite. Un vrai nid
d’oiseaux. Je prends un air décidé et clame à voix haute que tout va bien.
Epuisée au bout d’un moment, je décide de prendre une pause.
Murphy est bien attaché dans un coin du salon, au gigantesque pot de
fleur. Il gigote mais ça ne me dis rien qui vaille. Je le prends pour
responsable de tout ce bazar, même si j’aurais pu l’enfermer dans une
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