Page 213 - La mafia des generaux-Hichem Aboud _Classical
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syndicat du crime  211

      Dans l'exercice de ses fonctions, le colonel Bachir
n'était guidé que par ses convictions et sa conscience.
Lorsqu'il a mené les premières opérations de représailles
contre des civils dans les quartiers de Bachadjarah et des
Eucalyptus, il était convaincu de mener un juste combat
contre des hordes terroristes qui avaient fait beaucoup de
mal aux populations civiles. Il ne soupçonnait pas le jeu
macabre des généraux mafieux.

      J'étais sûr qu'il finirait par découvrir la réalité, et je
doutais fort qu'il puisse aller au-delà du grade de colonel.
J'étais persuadé aussi qu'il connaîtrait le même sort que
ses collègues, les colonels Boukhari et Abdou. Il ne pour-
rait jamais faire partie des sous-traitants de la mafia.
J'avais raison. Aux dernières nouvelles, il est sans
fonction.

      Certes, il est vrai que les services de sécurité comp-
tent très peu d'hommes comme lui. Il y a bien évidemment
des tortionnaires dans l'armée ou la police. Et ils sont
nombreux. Fiers de leur bêtise et de leur lâcheté. Ils
oublient qu'en disposant d'un homme ligoté pour le sou-
mettre à des sévices corporels, ces bourreaux ne font
qu'étaler leur faiblesse et leur lâcheté. Les tortionnaires
sont des cas pathologiques qui relèvent de la psychiatrie.
J'en ai connu deux qui se sont particulièrement distingués
lors des événements d'octobre 1999. L'un était de forte
corpulence et souffrait d'impuissance sexuelle. L'autre
était un cocu notoire, marié à une fille de la bourgeoisie
algéroise, surnommée « sac à spenne». Incapable de
divorcer pour des raisons matérielles, il frimait devant ses
collègues qui riaient sous cape chaque fois qu'ils le
voyaient passer. Les deux agissaient bien entendu sous des
pseudonymes : Mustapha et Yazid.

      Ces opérations de représailles n'ont pas manqué
d'exacerber la guerre civile. Policiers, forces spéciales,
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