Page 105 - Des ailes pour le Brésil
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Chez American Express, les managers avaient à rendre compte tout
                  le  temps  au  service  comptable  de  Brighton,  où  un  pernicieux  et

                  ancestral ennemi anglais surveillait la comptabilité de mon service
                  de quatre personnes.

                      Après plusieurs prises de bec orageuses au retour de mes divers
                  voyages, sur la conversion de changes monétaires, j’avais décidé de

                  le mener à mal.
                      L’occasion  se  produisit  pendant  un  voyage  professionnel  à
                  Bombay, en Inde, à la fin de l’année, où j’avais profité de l’occasion

                  pour m’échapper et rejoindre mon copain André à Goa- plage des

                  plus belles fêtes du monde.
                       À mon retour au bureau, j’eus un certain plaisir à envoyer à mon
                  comptable mes notes de frais de représentation, particulièrement

                  impénétrables, libellées en roupies de sansonnets indiens !
                       Mon collègue british se cristallisa d’une façon obsessionnelle sur

                  une des notes ou de nombreux chiffres se suivaient, d’une valeur
                  absconse, pour une invitation de nombreuses personnes à déjeuner.

                  Notre chef comptable ne voulut, qu’après de nombreuses péripéties,
                  enregistrer seulement trois mois plus tard la facture, au compte de

                  mon centre de profit. Pour résoudre cette plaisanterie, je dus faire
                  intervenir mon président. Le piège s’était refermé savoureusement.

                  Le  travail  administratif  était  fastidieux,  comparable  à  celui  d’une
                  banque et les réunions trop nombreuses. Je passais mon temps à

                  relater ma moindre activité professionnelle et consigner tous mes
                  mouvements.
                       Pendant  de  nombreux  week-ends,  je  me  plongeais  dans  les

                  chiffres et les mémos. Certaines fins de semaine, nous pouvions être
                  envoyés  en  stage  dans  un  autre  pays,  finalement  nous  devions

                  consacrer notre vie à la société. C’était un véritable apostolat, nous
                  devions être fiers de travailler dans cette famille.

                       Après plusieurs années dans les bureaux, rue Scribe à Paris, ce
                  qui était prévisible arriva, je fus licencié à mon tour.

                      Le motif soi-disant !
                      Je n'avais pas le profil de la compagnie et j’en suis fier !
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