Page 125 - Des ailes pour le Brésil
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chez moi à Paris fut très fair-play, sans rechigner, il me remboursa
ce que j’avais payé.
Mon véhicule suivant, un « Lumar » de
fabrication locale, était entièrement en plastique, ce
qui est fortement recommandé avec la forte teneur
en sel des embruns du littoral. Pour prendre
livraison de cette voiture, José, un petit basané, me
transporta dans son impressionnant 4X4 à l’usine située à une bonne
distance de Fortaleza.
Je ne sais pas s’il voulait m’impressionner pendant le trajet, mais
il ouvrit sa boîte à gants, pour exhiber un grand pistolet à la crosse
blanc nacré, qu’il posa lourdement sans un mot sur son genou. À
bon entendeur, si je n’achetais pas la voiture ! Sa sœur Sonia, une
véritable mère maquerelle louait des voitures et aussi d’autres
services comme celui de procurer des compagnes de nuit aux
étrangers de passage. Mon nouveau « Lumar » avait évidemment
aussi des problèmes, nous avons découvert un jour que son moteur
vendu pour fonctionner à l’essence était en réalité à l’alcool. J’étais
le « Gringo », l’étranger, exploité en toutes-bonnes consciences.
Me plaindre et me rebiffer n'aurait servi à rien, il fallait m’adapter.
À l’époque, un vol de la compagnie aérienne « Varig » partait
toutes les semaines de Milan, à destination de Fortaleza.
Nos cousins italiens achetaient sur catalogue des forfaits d’une
semaine, tout compris : soleil, détente, amour et en plus, la
découverte des joies tropicales.
Le package comprenait un possible changement de la voleuse
d’amour en cas d’insatisfaction !
L’état du Ceará était réputé pour son tourisme sexuel et pour ses
tueurs à gages au nom évocateur de « pistoleros ».
Ces derniers travaillaient le plus souvent en fin de semaine, ce
qui alimentait les programmes d’informations télévisés du lundi
matin.
En moyenne, il fallait compter à Fortaleza ou dans la région une
vingtaine d’assassinats par week-end.