Page 39 - Des ailes pour le Brésil
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Ce passage sous les drapeaux avait  renforcé chez moi ce que
                  j’avais  déjà  d’opiniâtre  et  m’aura  incontestablement  mûri  et

                  désépaissi.
                       Les militaires ont la conviction d’être différents du reste de la

                  société par le fait qu’ils sont obligés éventuellement de retirer la vie
                  ou  de  sacrifier  la  leur  pour  leur  pays,  ce  qui  est  parfaitement

                  compréhensible.
                      Il ne faut pas oublier que le premier aspect de la vie militaire est
                  son caractère communautaire et qu’il laisse inexorablement ensuite

                  des traces indélébiles, qui, je pense, dans mon cas, furent salutaires.

                   Le quotidien d’un soldat n’est pas folichon.
                  De retour en France, je fus affecté à la base aérienne du Bourget, où
                  il faisait un froid de canard.

                  Ce fut une affligeante immersion, contrastant avec les températures
                  africaines !

                         Notre travail consistait essentiellement à charger des caisses et
                  des caisses dans les avions qui allaient à Reggane, en plein désert

                  algérien, où, comme nous l’avons appris plus tard, se déroulaient le
                  début des essais nucléaires français.

                  L’armée  me  laisse  quelques  bribes  de  souvenirs  en  forme  de
                  mosaïques, avec en toile de fond une vision pessimiste de la triste

                  réalité de l’Afrique.
                  Je fus démobilisé en février 1961.

                  Je n’ai pas le souvenir pendant mon service militaire de vingt-quatre
                  mois  en  Afrique  Occidentale,  surtout  au  Sénégal  d’avoir  eu
                  beaucoup de nouvelle de ma famille.


                  Comme je n’aimais pas écrire le silence, était absolu.

                  CHAPITRE III.
                   La famille, entre ailes et elles, mes trois mariages.

                              La  réinsertion  à  la  vie  civile  est  toujours  une  épreuve
                  douloureuse. À mon retour, l’atterrissage fut rude ! Je découvrais la

                  réalité  de  ma  nouvelle  vie  parisienne.  Ma  situation  n’était  pas
                  brillante, je me retrouvais sans domicile, complétement désorienté,

                  avec très peu de ressources financières.
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