Page 91 - Des ailes pour le Brésil
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Enfin nous nous posâmes en Malaisie, à Kuala Lumpur, où
nous fûmes transférés dans une salle sans climatisation, encore plus
petite et inconfortable que celle de Bahreïn. L’insupportable était au
summum, et la révolution éclata.
Les Américains nomment cet état « air rage ».
La compagnie demanda le renfort de la police, afin de calmer les
passagers.
Ayant pris la fuite, je ne pourrais pas raconter l’agonie de ce vol, je
n’ai d’ailleurs pas cherché à en connaître la fin.
Je suis sorti de la zone de transit, j’ai passé le poste de police
et j’ai acheté aussitôt un billet pour Den Pasar, en attendant avec
impatience que la compagnie retrouve mon bagage. Finalement,
après ce long, éprouvant et épique voyage de trois jours, et après
avoir pris trois avions successifs, le dernier coup d’aile, d’une durée
de trois heures me déposa à Bali. J’étais enfin en vacances chez ma
sœur Noëlle, c’était le principal.
Les voyages forment la jeunesse !
Pendant mon séjour en célibataire à Bali, dans un restaurant, à
Kuta beach, un homme distingué, probablement un militaire de
carrière habillé d’un short, vestige de plusieurs modes passées, me
tapa affectueusement sur l’épaule en me disant d'un ton gaillard et
affirmatif : « Vous avez certainement fait vos armes à l’école de
cavalerie du cadre noir de Saumur ! ». Resté pantois, je lui
demandais pourquoi cette affirmation. Il me répondit en souriant et
goguenard : « Ne fais pas l’innocent, je te reconnais, tu es le cavalier
qui a réveillé un étage entier de l’hôtel, tôt cette nuit dernière en
brisant un lavabo ! » J’avais effectivement fait ce dégât dans la salle
de bain et j’avais dû, avec une pince à épiler, retirer délicatement des
morceaux de porcelaine du postérieur de ma charmante cavalière
australienne ! Que les lecteurs puritains pardonnent cette anecdote
égrillarde.