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PARTIE III
B / MASQUES, TESTS, ÉCOLE,
TRANSPORTS : AUTANT DE FAILLES
DANS LE DÉCONFINEMENT
À la mi-mai, un certain nombre de scandales latents perdurent comme autant de potentiels
agents actifs d’une nouvelle vague épidémiologique. Le manque de matériel sanitaire,
autant que le retour à l’école et le redémarrage des transports sans adéquation avec les
besoins réels risquent d’avoir des effets délétères. Ces sujets sont évidemment non
exhaustifs. En réalité, bien d’autres secteurs risquent également de poser des difficultés.
1 / LES MASQUES
Tandis que le gouvernement réquisitionnait de force les masques des collectivités
territoriales sur les tarmacs des aéroports début avril, la grande distribution annon-
çait dès fin avril la mise en vente de millions de masques. De manière totalement
inédite, sept ordres de professionnels de santé ont publié un communiqué commun le
30 avril pour pointer du doigt le grand nombre de masques bientôt mis en vente par la
grande distribution. Dans ce communiqué écrit au vitriol, les soignants dénoncent
l’inquiétude qu’ils ont eue, mal protégés contre l’épidémie depuis de nombreuses
semaines à cause de la pénurie de masques engendrée par les manques du gouverne-
ment. À ce sujet, des documents préparatoires, dévoilés par « Le Monde », ne rassurent
en rien. Au contraire, ils évoquent notamment l’insuffisance de masques disponibles
d’ici juin. D’après ces documents, le ministère de l’Intérieur est obligé de reconnaître
une faiblesse majeure : « malgré ces volumes importants, les masques disponibles
sont inégalement répartis et le risque est que certains Français en aient trop et
d’autres n’en trouvent pas . Cette situation est provisoire et devrait se régulariser dès
le courant du mois de juin, compte tenu de l’approvisionnement massif du marché . »
Au courant du mois de juin, donc, bien après la date du 11 mai. Devant l’Assemblée
nationale, Jean Castex confirme le 12 mai : « on peut considérer qu’à la mi-juin, la
question quantitative des masques pourra être résolue ».
Suite aux annonces faites par plusieurs enseignes de la grande distribution de la
mise en vente de millions de masques et de protections à compter du lundi 4 mai,
pour les professionnels de la santé « la consternation s’allie au dégoût ». Ils s’inter-
rogent dans ce même communiqué : « Où étaient ces masques quand nos médecins,
nos infirmiers, nos pharmaciens, nos chirurgiens-dentistes, nos masseurs-kiné-
sithérapeutes, nos pédicures-podologues, nos sages-femmes mais aussi tous nos
personnels en prise directe avec la maladie tremblaient et tombaient chaque matin ? ».
Ils peinent à cacher leur amertume : « Comment nos patients, notamment les plus fragiles,
à qui l’on expliquait jusqu’à hier qu’ils ne pourraient bénéficier d’une protection adaptée,
vont-ils comprendre que ce qui n’existait pas hier tombe à profusion aujourd’hui. 100
millions par ici, 50 millions par là. Qui dit mieux ? C’est la surenchère de l’indécence ».
Les enseignes assurent qu’il ne s’agit pas de stocks cachés, mais de commandes passées,
dont les masques arriveront dans les prochains jours. Le soupçon demeure toutefois
et les demandes de publication des factures et bons de commande se multiplient…
d’autant que se pose aussi la question du coût d’achat et du prix de vente. Après avoir
refusé dans un premier temps de plafonner le prix des masques pour ne pas « freiner
l’innovation », le gouvernement a finalement annoncé le plafonnement à 95 centimes
par masque, soit environ 10 fois plus cher qu’avant l’épidémie . Plusieurs médecins,

