Page 170 - ANGOISSE
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- Permettez-nous, reprit le ministre de la santé, dans ces circonstances
douloureuses de vous présenter toutes nos condoléances les plus sincères.
- De la même manière malheureusement que je pourrais vous présenter les
miennes en retour puisque j’ai vu à la télévision les images de cette démente
prévaricatrice, ayant transgressé la loi du très haut en déclenchant sa ceinture
d’explosifs afin de tuer plusieurs dizaines de policiers. Ce qui me permet
messieurs, enchaina-t-il aussitôt, de réaliser un triste et amer constat à l’aune
de ces deux événements odieux et abjects. Si on excepte la barbarie exercée
par les troupes allemandes le 10 juin 1944 à Oradour-sur-Glane ayant
massacré si ma mémoire ne me fait pas défaut, six cents quarante deux civils
dans des conditions particulièrement atroces, la France en paix n’avait
jusqu’alors jamais connue une telle atrocité que celle qui s’est déroulée à
Strasbourg aujourd’hui même. A quelques heures d’un autre événement, en
banlieue lyonnaise, tout aussi épouvantable dans sa bestialité et dont la France
se croyait jusqu’alors épargnée sur son propre territoire. Vous comprendrez
par conséquent que face à ces constats je ne peux que raisonnablement
donner foi à vos propos concernant les desseins de votre ministre de la
défense.
Le ministre de l’intérieur estima judicieux de ne pas rappeler à leur
interlocuteur que le matin même, celui-ci avait pris le parti de rompre tout
dialogue avec lui-même en ayant alors imaginé l’ineptie de son discours. Il
préféra livrer l’information en guise de couperet.
- Cet apprenti dictateur puisque c’est ainsi qu’il faut le concevoir nous a fixé un
ultimatum. A savoir que si d’ici demain vingt heures nous ne nous sommes pas,
comme d’autres je l’imagine, rattachés à son projet dément, il sera procédé,
suivant son propre discours, à l’élimination de toutes les personnes
susceptibles de le contrecarrer. Nos propres existences n’ont aucune
importance à nos yeux dans le défi qui est le nôtre et je tiens tout de suite à
souligner avec force que nous ne sommes pas ici afin de nous placer sous votre
protection. Ce que je tenais simplement à vous indiquer de manière formelle
c’est que dès lors qu’il aura totalement les mains libres, il mettra sans aucun
doute possible son projet à exécution. Et il sera alors trop tard.
- Je présume par conséquent que l’idée que vous souhaitez me faire partager
est identique à celle évoquée ce matin ?
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