Page 195 - ANGOISSE
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Le premier tir vint frapper le montant de l’une des fenêtres du premier
étage et la grenade lacrymogène vint finir sa course sur le trottoir. Le
gendarme, en parfait professionnel, rectifia la mire sans tension apparente et
projeta une seconde grenade. Celle-ci fit mouche en explosant une vitre au
travers de laquelle elle passa afin de réaliser son œuvre. La même manœuvre
se poursuivit avec un succès identique en brisant d’autres vitres du premier
étage ainsi que quelques-unes du second.
- Même s’ils cherchent à se réfugier au quatrième et dernier niveau, expliqua-
t-il, le gaz extrêmement concentré et volatile va petit à petit gagner toutes les
pièces et tous les étages. Ils seront tentés, s’ils en ont le temps, de s’enfermer
dans des bureaux mais il sera déjà trop tard pour eux. L’efficacité est pour ainsi
dire garantie. Nous n’avons plus qu’à attendre et être prêts pour le moment,
qui ne devrait pas tarder, où ils vont chercher à s’échapper.
- Ils sortiront peut-être les armes à la main ? questionna le ministre.
- J’en doute fortement. Le réflexe naturel de tout être humain dans ce genre
de situation est de trouver de l’air frais par tous les moyens. Ce qui veut dire
que bien que surentraînés sur un plan militaire, leur esprit ne sera conditionné
que par le fait de chercher à respirer.
- Certains risquent de ne pas trouver la sortie du fait de l’affolement.
- Vous avez raison. Sur une intervention planifiée, c’est généralement le
moment où l’on décide d’entrer avec des masques de protection mais en
l’occurrence ce n’est même pas la peine d’y penser. Nous n’avons pas
l’équipement adéquat. Ce que je peux par contre vous indiquer c’est que
compte tenu du nombre massif de grenades projetées pour maximiser nos
chances, ceux qui n’auront pas pu sortir risquent de sérieux problèmes.
- Lesquels ?
- Nécrose des tissus dans l’appareil digestif, œdèmes pulmonaires voire
hémorragies internes. Quelques cas de décès ont même été rapportés lors
d’une utilisation en lieu clos, comme c’est le cas ici. Ce que ces salopards
auront bien mérité, lâcha le gendarme en désignant d’une main tendue ses
quatre collègues gisant sur le trottoir.
Le ministre voulut faire cesser de tels propos de haine et de vengeance mais
il n’en éprouvait plus le courage. Lui-même s’imaginant déjà face au ministre
de la défense et lui collant, sans hésitation, une balle dans la tête.
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