Page 73 - le barrage de la gileppe
P. 73
73
Les ouvriers avaient allumé un feu de coke à l’intérieur du souterrain. Ils furent
soudain incommodés par les émanations et un de leurs compagnons de travail
demeuré à l’extérieur, M. Mawhood (qui devint par la suite barragiste de la Gileppe,
fonctions dans lesquelles lui succéda son fils), se précipita dans la galerie pour porter
secours à ses camarades.
Mais on le vit revenir bientôt, titubant. Un autre ouvrier, un Italien du nom de
Bracco — père de l’instituteur déjà cité — n’hésita pas à pénétrer à son tour dans le
couloir infesté et parvint à ramener sur son dos un ouvrier évanoui.
Les autres furent sauvés de la même manière, par Bracco et Léonard Legras, le
premier barragiste nommé par la ville de Verviers.
Des distinctions honorifiques récompensèrent les sauveteurs, nous dit l’ancien
maître d’école qui évoquait ce trait devant nous, en nous parlant des premières
années de la Gileppe, au cours d’un heureux après-midi passé dans sa petite
maison de Béthane...
Les derniers travaux
Explication d’une corniche
D’après le projet accepté par le ministre et dont la réalisation était
activement poussée, le mur du barrage ne devait s’élever qu’à trente-sept
mètres, pour retenir une réserve de six millions de mètres cubes. Il aurait
suffi de le surélever encore de dix mètres pour doubler la capacité du
réservoir, et des pétitions furent envoyées de Verviers et de Limbourg au
ministère dans l’espoir d’obtenir cet exhaussement.
Victor Doret comptait parmi ses nombreuses relations parlementaires un
personnage influent, le député Charles Delcour originaire de Limbourg où il
venait, à la bonne saison, passer ses congés de détente.
En 1874, Delcour, devenu ministre de l’intérieur, séjournait dans sa jolie
cité natale. Doret profita de sa présence, lui rendit visite et l’entraîna à la
Gileppe.
Les travaux étaient déjà très avancés et la corniche couronnant l’ouvrage
était placée.
Le filateur Verviétois se montra si persuasif que Delcour retourna à
Bruxelles entièrement rallié à la proposition d’exhaussement dont son ami
lui avait fait valoir les avantages considérables. Un mémoire fut rédigé,
soumis à Beernaert, ministre des Travaux publics, et, en juin 1874, un crédit
supplémentaire de 1 700 000 F était voté.
En août, les entrepreneurs Braive et Caillet, étaient chargés de terminer le
travail jusqu’aux quarante-sept mètres.
Les ouvriers poursuivirent leur travail, par-dessus la corniche qui fut laissée
en place. Beaucoup de visiteurs ignorent qu’elle marque une date et un
premier succès dans l’histoire du barrage !