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La crise financière a déjà atteint le marché des dettes publiques frappant
notamment les pays émergents les plus endettés, qui subissent
simultanément une chute des revenus de transfert des immigrés, une fuite
des capitaux, et une hausse des taux d’intérêt qui leur sont concédés. Les
sorties de devises déprécient les monnaies locales, cette baisse de parité
renchérissant le coût de la dette. De février à mai 2020 la valeur des
monnaies du Brésil, de l’Uruguay, de la Colombie et de l’Afrique du Sud a
déjà chuté d’environ 15%. Les revenus des pays qui dépendent du pétrole
ou du tourisme s’effondrent. À la mi-avril 2020 une centaine de pays
avaient fait une demande officielle de prêt au FMI.
En Europe, les fluctuations de l'écart (ou « spread ») entre le taux des
obligations d'Etat italiennes, considérées comme plus risquées, et celui des
obligations souveraines allemandes, jugées les plus sûres, est l’un des
nombreux indices des incertitudes qui travaillent les marchés financiers et
d’une crise des dettes souveraines toujours possible.
A l’échelle planétaire les institutions politico-financières
endossent la fonction d’assureur public des grands intérêts privés
Pour éviter que ce que le FMI nomme « le grand confinement » ne dégénère
en effondrement général du système économique et financier et en crises
géopolitiques qui s’enchaînent, les institutions politico-financières sont
contraintes de renoncer provisoirement aux dogmes libéraux pour leur
préférer des dispositifs pragmatiques de secours du capitalisme. Etats
capitalistes et banques centrales endossent la fonction d’assureur public
des grands intérêts privés en couvrant les risques que dirigeants et
actionnaires ne veulent pas assumer en temps de crise. La Réserve fédérale
aux Etats-Unis et la Banque centrale européenne rachètent ainsi en masse
aux institutions financières privées des titres de dette émis par des firmes
multinationales et des titres de dette publique. Les banques commerciales
et les fonds d’investissement sont ainsi assurés de pouvoir se défaire
auprès des Banques centrales des créances douteuses qu’elles détiennent.
Parallèlement, la menace d’une crise systémique encourage les Etats à
s’écarter des dogmes budgétaires en augmentant les dépenses publiques
pour maintenir à flot les entreprises et compenser pour partie la perte de
revenus primaires des ménages. Cette flambée des dépenses publiques au
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