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OVERDOSE DE MOTS
Je suis dehors. Il fait nuit étoilée et j’ai le nébuleux assis sur le
banc public dans la peau de cette ville. A deux pas et trois
mots, une péniche est accostée comme un morceau d’histoire
pendu au gibet de l’indifférence et coule lentement dans le
néant prohibitif de notre temps dépouillé de sa substance
nutritive du : prends le temps au temps.
Me sortir est une priorité. Je me prends par la main tous les
soirs et me retire les épines des réseaux sociaux, d’une
connexion anaconda qui digère l’entité et l’espace de vie à un
écran qui me grille les yeux.
Ce soir ma patience est au bout d’une corde. J’attends le
moment où d’un cou elle s’enroulera et d’un coup de canif sera
tranchée. Pour l’instant je ne tranche pas ma décision. C’est
une partie de poker menteur et chacun de mes avis s’enferme
dans une tourelle de dénégations où dans une fosse
d’affirmations, le tout dans la prolifique passion de les
entendre et de les arracher de ma terre comme des oignons
trop gourmands de fleurir.
Je suis en chemise, short, tongs en ce printemps qui se
reconstruit et dessine de partout sa marque de marqueterie et
je respire la frondaison de mes pensées toxiques quand
j’aperçois non loin de ma position une femme en salopette
violette. Une incohérence dans ma perceptive.
J’ai l’impression que ma rétine divague légèrement sur la
droite, la gauche, non… sensation d’un mal de mer et que je
vais remettre mon bulletin de santé au maître de cérémonie
qui est en train de me piquer…
— Alors ? dit la femme en salopette violette.
— Overdose de mots…passer moi la sonde de restriction des
mots enchaînés, dit le médecin dictionnaire de poche.