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Férid Boughedir / Les mésaventure du panafricanisme cinématographique 273
mais pas pour leur essor économique, notamment pour le développement
de leur production et de leur diffusion en Afrique même.
Pourtant dès le départ, la question s’est posée: comment, parallèlement à
cette étape de promotion culturelle, faire avancer concrètement sur le plan
du développement et de l’encadrement économique, les films africains pro-
duits et diffusés au compte-goutte, car souvent privés du minimum néces-
saire à leur existence et à leur viabilité?
Cet outil opérationnel du Panafricanisme cinématographique, imaginé dès
1969 par Tahar Chériaa et Sembene Ousmane, s’est concrétisé avec la
création de la Fédération Panafricaine des Cinéastes, la FEPACI, qui a vu
légalement le jour en 1970 aux JCC , avec sa mise sur pied par les deux
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seules associations de cinéastes existantes alors, la sénégalaise et la tuni-
sienne, créée cette année là pour l’occasion, avec le double parrainage de
Sembene Ousmane et de Tahar Chériaa, avec pour premier Secretaire
Général, le dynamique et inventif réalisateur sénégalais Ababacar Samb
Makharam.
Le programme prioritaire de la FEPACI des origines, qui semble
bien oublié aujourd’hui, était tout d’abord de convaincre les gouvernements
africains de « décoloniser les écrans », dominés alors de façon monopolis-
tique par les fournisseurs de films occidentaux, puis, une fois ce marché de
diffusion essentiel récupéré, de créer ensuite dans la foulée un encadrement
fiscal et légal rendant la production de films africains viable économiquement
par les ressources nationales et régionales. Cela, afin de ne plus dépendre es-
sentiellement des soutiens financiers français et européens qui leur avaient
souvent permis d’exister sur la scène culturelle internationale jusque là.
Au fil des années on vit même se créer des « succursales » de la FEPACI,
créées par des cinéastes vivant à Paris comme le comité africain des ci-
néastes (CAC) créé par le Mauritanien Med Hondo et le Burkinabè Ma-
madou Djim Kola puis la « Guilde Africaine des Réalisateurs Producteurs
» présidée à l’origine par le cinéaste congolais Balufu Bakupa- Kanynda,
ou en Afrique même comme l’UCECAO créée par Souleymane Cissé au
Mali en 1995, organisations dont les membres, tout en défendant leurs
intérêts spécifiques sur place, continuaient à être membres de la FEPACI.
III- NAISSANCE ET DECES DU PREMIER « MARCHE COMMUN »
DU CINEMAAFRICAIN, LE CIDC
Après l’étape du dialogue culturel interafricain réussi par les festivals, la
FEPACI allait donc s’efforcer de faire passer le Panafricanisme cinémato-
graphique sur le plan de la lutte économique, notamment par le biais du