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programmes, et ces films devraient être projetés dans le cadre d'un horaire
potentiel lorsqu'ils sont le plus susceptibles d'attirer le public, et le prix des
billets ne devrait pas dépasser celui pratiqué pour les films étrangers. Si les
cinémas subissent des pertes du fait de la projection de films produits loca-
lement, ces pertes devraient être déduites de leurs taxes annuelles à l'État.
Enfin, les pays africains devraient utiliser les droits d'importation perçus
sur les films étrangers pour financer les cinéastes indigènes « indépen-
dants » jusqu'à ce que leurs économies soient suffisamment industrialisées
pour qu'ils puissent se lancer dans la production industrielle de films pour
le marché concurrentiel des films commerciaux.
La seule exception à la tradition susmentionnée dans les études
sur le cinéma africain sont les études critiques auteuristes des cinéastes afri-
cains dans lesquelles les informations biographiques l'emportent sur l'ana-
lyse textuelle, et cette dernière est limitée à l'analyse de la narration, de la
caractérisation, de l'intrigue, de la sociohistoire et de la culture du film, avec
peu d'attention accordée à la spécificité de la narration filmique, comme
dans le cas des études de Françoise Pfaff . Bien que le travail récent de
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Malkmus & Armes soit une rupture bienvenue par rapport à la préoccupa-
tion habituelle des études historiques de l'industrie cinématographique ou
des études critiques auteuristes, il ne parvient cependant pas à aborder, de
manière systématique, l'objet d'étude : le cinéma africain. Les lacunes de
l'ouvrage peuvent être attribuées à l'absence d'un cadre théorique bien éla-
boré. Par exemple, aucun critère n'est donné pour déterminer ce que l'on
peut qualifier de cinéma africain et la nature de ses styles de narration et de
production. En outre, la question de la neutralité universelle présumée du
médium cinématographique n'est pas abordée, pas plus que les contestations
entourant ces hypothèses et leurs implications pour la pratique cinémato-
graphique en Afrique. La question du point de vue au cinéma, dans la me-
sure où elle affecte les concepts de subjectivité et de construction de
l'identité, de classe, de genre, d'ethnicité, de race, de nationalité, etc., et le
positionnement textuel du spectateur, n'est pas non plus abordée. En outre,
comme dans les études antérieures sur le cinéma africain, la question des
pratiques cinématographiques de l'Afrique coloniale n'est pas pleinement
explorée .
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Même si Malkmus et Armes regroupent des films tels que Les
Sanders of the river de Zoltán Korda et L'Homme du Niger de Jacques
de Baroncelli (1939, France), dans la catégorie des films de fiction euro-
péens se déroulant en Afrique, et s'ils réservent une sous-rubrique aux films
des unités cinématographiques coloniales, aucune distinction n'est faite
entre le cinéma africain colonialiste, catégorie à laquelle appartiennent les