Page 14 - C:\Users\Pauline\Documents\Flip PDF Professional\Composition1\
P. 14

Une « mise en science » et l’appropriation


           du corps féminin par les savoir médicaux





                                           L’idéal féminin : la « féminité moderne »





           Il y a une intervention du social durant toute notre vie,
    à l’intérieur de la chair même de notre corps. Le genre précède

    le sexe, c’est-à-dire que le sexe est toujours appréhendé via le

    genre, au sein d’une relation sociale, hiérarchisé. Donc le sexe
    est  une  catégorie  d’analyse  d’un  rapport  de  domination,  qui

    « passe  par  la  naturalisation  d’une  relation  hiérarchi-

    que »  (Dorlin,  2003).  Le  sexe  correspond  à  « la  représentation  biologisée  du  rapport  de
    pouvoir qui soutient l’idéologie du genre » (Ibid). La féminité et les normes qui l’institut

    sont socialement construites et sans cesse redéfinies. Elles sont à saisir dans des rapports

    de pouvoirs, dans des contextes précis.


             Le  processus  de  « pathologisation »  du        jours, puis l’institution religieuse, quand l’enfant est
      corps féminin vieillissant – avec une attention parti-   sevré. La figure de la mère renvoie à une femme qui
      culière sur l’arrêt des menstrues – est à comprendre     effectue, incorpore les trois tâches à la fois, entrai-
      dans  la  relation  intrinsèque  fécondité/féminité.  Au   nant  une  modification  dans  la  division  du  travail

      18  siècle, durant l’extension coloniale et le nationa-  reproductif.
         e
      lisme  accompagné  d’une  politique  populationniste,
      le  corps  féminin  est  un  instrument  reproducteur,

      pensée  à  travers  sa  fécondité.  La  philosophe  Elsa
      Dorlin parle de « féminité moderne », elle la définie
      comme  une  norme  de  « féminité  dominante »,
      « pensée  comme  passive,  douce,  sensible  et  mater-
      nelle »  (Dorlin,  2009).  C’est  à  cette  période  que  la

      figure de la mère maternelle prend son essor, et s’est
      constituée comme étant le pendant de la masculini-
      té, d’une part, mais aussi elle s’est appuyée sur des

      « contre modèles » féminins. En effet, toutes ne bé-
                                                                      La  maternité  des  femmes  blanches  va  être
      néficient pas des symboles de la maternité, en parti-
                                                               promue et valorisée afin de régénérer la nation. Une
      culier les femmes colonisées et racisées, vues comme
                                                               figure  de  la  mère  « à  la  fois  aimante  et  allaitan-
      trop virils, hypersexualisées, dénuées d’humanité et
                                                               te »  (Dorlin,  2014 :  208).  Une  forme  de  féminité
      de sensibilité.
                                                               « saine »  va  établir  une  échelle  des  tempéraments
             Jusqu’au  18   siècle,  trois  figures  interve-
                           e
                                                               féminins. La mère se trouvant au sommet de celle-
      naient dans la reproduction : la génitrice, la nourrice
                                                               ci, excluant d’autres femmes de la maternité.
      pour  s’occuper  de  l’enfant  et  le sevrer  les  premiers

                                                            14
   9   10   11   12   13   14   15   16   17   18   19