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Cependant le monde médical n’est pas le seul espace d’apprentissage. D’autres
figures « profanes » sont des points de référence, telle que la mère, les aïeuls, ou les amis,
les proches. L’apprentissage se fait aussi par observation. Dans son enquête, Cécile
Charlap se rend compte qu’un nombre de femmes font appel à des souvenirs de leurs
parentes avec des bouchées de chaleurs, ayant pris du poids, etc. L’observation et le
partage de savoir sont des sources d’informations pour se conformer à la figure de la
« femme ménopausée ». Néanmoins il y a quelques différences selon les classes sociales,
où la question est plus ou moins un tabou.
La ménopause est aussi un « objet d’interaction informel entre paires », basée sur l’anticipation (interroger
pour anticiper), la comparaison (afin de valider ces propres expériences) et le partage de savoir
(l’apprentissage du corps, des techniques de soi, des traitements, etc.). La norme est donc aussi réactualisée
entre les femmes en question elles-mêmes.
Toutes les femmes ne subissent pas de la même manière cette injonction sociale. Certaines en ont
conscience et cherchent à créer des espaces de liberté et de réappropriation de leur propre corps. Par exemple,
se revendiquer femme et non femme ménopausée, afin de casser la relation femme/fécondité, donc redéfinir la
notion et se l’approprier. Certaines portent un regard critique sur les discours médiatiques, « on a
l’impression qu’on va devenir un monstre à la ménopause », s’exprime une des enquêtées (Ibid). D’autres
rejettent les traitements hormonaux, et voient la vieillesse comme un processus naturel et normal,
l’empêcher serait donc contre nature et illogique. Les paires, Internet ou les aïeuls peuvent être des sources et
des moyens d’autonomisation face au discours médical.
En effet, malgré le discours ambiant, la ménopause n’est pas vécue négativement par toutes les
femmes dans les sociétés occidentales. Les sociologues Michèle Kérisit et Simone Pennec (2001) ont mené une
enquête en Bretagne et au Québec dans les années 1970. Elles en ont conclu que la ménopause est plus vécue
comme une « étape physiologique », une transition puis une libération (moins de contraintes sexuelles et
arrêt des menstrues). L’étude de Kérisit en 1998 à Ontario donne à voir la ménopause aussi comme une
libération, « en particulier libération de « l’obligation d'enfant » dans une société alors très catholique :
libération de grossesses non désirées sans doute mais aussi libération du travail de
reproduction sociale en général ». Une troisième étude en 2000 (Ibid) est basée sur
des récits de vie de femmes à la retraite. Celles-ci ne s’expriment pas vis-à-vis de la
ménopause comme un tournant dans leur trajectoire féminine, alors que d’autres
éléments biographiques si.
Ses différentes études tendent à contrebalancer le
poids des discours médicaux, et rappellent que les
femmes ne sont pas seulement des individus passives.
Pour certaines, « la ménopause ne semble pas subie
comme une perte » (Ibid) mais plutôt comme un
avantage, celui de la fin « des pertes ».
Donc moins pathologisée par les femmes elles-mêmes. La ménopause ...
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