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Margaret Lock a entrepris une étude comparative à partir d’enquêtes qualitatives sur les
symptômes associés à la ménopause chez des américaines, et les symptômes associés au kônenki chez
des japonaises. Pour que ces dernières s’expriment, Lock a parfois rajouté le terme shôgai (effets néga-
tifs) à kônenki pour qu’elles y relient des symptômes désagréables.
JAPON ETAT-UNIS
Raideur épaules, maux de têtes, lombago, consti- bouffées de chaleurs (31-35%) et sueurs nocturnes
pation, frissons, irritabilité (12-20% VS au Japon 4%).
Bouffées de chaleurs : 10%
Sueurs nocturnes : 4%
Les analyses de Lock mettent en exergues plusieurs différences dans la manière dont les fem-
mes vivent ce moment de leur vie. Non que les femmes japonaises soient biologiquement différentes
que les femmes américaines, mais que le contexte social, les discours médicaux ou encore les concep-
tions culturelles et vision du monde sont assez distinctes.
La question du corps
Comme nous l’avons souligné plus haut, la conception du corps dans la
société japonaise promeut l’individu comme responsable du bon équilibre de
son corps. De ce fait, les femmes se sentent responsables de kônenki et la façon
dont elles la vive. D’après elles, il faut mettre en œuvre des attitudes
appropriées pour y faire face. On voit donc comment la morale et la santé sont intimement
reliées dans la manière dont ces femmes ressentent leur corps en
changement. Dans leurs discours, il y a l’idée que les comportements
personnels peuvent affecter le fonctionnement du corps. Une attitude
adéquate, saine et un contrôle de son état mental peut aider à surmonter
les difficultés du kônenki. Il faut « savoir endurer et ne pas se plaindre de
ses maux » (Ibid). Autrement dit, moins on en parle, moins on ressentira
d’effets négatifs. Il y a un caractère performatif – et aussi placébo – dans le
fait même de l’exprimer.
En Occident, le corps est plus proche de la « machine », il est construit et
pensé séparément de son environnement. Pour reprendre les termes de Philippe
Descola (2005), l’ontologie naturaliste aborde le corps comme un composé
d’organes, de systèmes nerveux et chimiques, pensé à
travers des catégories de la médecine moderne, qui s’est
développé en occident à travers la dichotomie Nature /
Culture. C’est un corps rationalisé et/ou a rationalisé.
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