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En ce qui concerne les discours médicaux : « la politique en matière de
Les discours vieillissement (…) s’élabore donc dans ces deux espaces (Japon et
médicaux USA) culturels à partir d’affirmations sur la place des femmes dans la
société » (Ibid).
En Occident, ils sont centrés sur la défaillance des ovaires et la baisse
d’œstrogènes. Plus particulièrement aux Etats-Unis, les discours sont
articulés autour des changements physiologiques et les risques de développer
des maladies plus ou moins graves. C’est donc une approche essentiellement
biologique entrainant une médicalisation du corps féminin vieillissant qui
prime. Ces femmes sont appelées à faire face à leur responsabilité individuelle
pour rester au top de leur forme. Certaines font appel à des traitements
hormonaux, voire à des interventions chirurgicales. Cependant il n’y a pas d’obligation formelle, mais elles
sont amenées à entreprendre une forme de gouvernementalité et de technique de soi, à travers leurs échanges
avec les médecins, vus comme porteurs de discours légitime.
Au Japon, les discours sont moins centrés sur la défaillance des ovaires et la baisse des œstrogènes,
mais plus sur la physiologie et ces changements. Les discours politiques placent leur focale sur les soins qu’el-
les doivent prodiguer aux plus âgées. Leur position sociale de femmes d’âge mûr en fait des « cible d’interven-
tion politique plutôt que médical. (…) La femme japonaise sera portée à ignorer ou à surmonter tout malaise
faisant preuve de maitrise d’elle-même et de discipline afin de pouvoir continuer à remplir sans interruption
ses devoirs sociaux » (Ibid). Ici, l’Etat intervient directement. Les symptômes du kônenki sont interprétés
comme conséquences de l’instabilité du corps en âge mûr, indifférencié sexuellement. Maux de tête, raideur
épaules, étourdissements, etc. reviennent de manière récurrente chez les japonaises, mais sont peu fréquents
chez les américaines. Les japonaises ne considèrent pas les bouffées de chaleur comme le principal symptôme,
de ce fait, « les médecins japonais n’ont pas ressenti le besoin de prescrire un traitement hormonal pour les
atténuer » (Ibid). De plus, Lock parle aussi d’une grande peur d’effets iatrogènes chez les japonais, de manière
générale. Cela est à relier à leur vision du monde, les traitements hormonaux sont une altérité au corps, et
donc peuvent provoquer des déséquilibres. Ici, les médecins ont plutôt tendance à prescrire des exercices phy-
siques, une bonne alimentation ou, au pire des cas, des plantes médicinales.
Ces différentes analyses anthropologiques nous amènent à conclure que la
cessation des menstrues fait rentrer les femmes dans un statut social différent.
C’est une rupture avec les représentations liées aux femmes dans la société. La
ménopause questionne la frontière du féminin/masculin et les rapports sociaux
de sexes et de domination. Le sang menstruel est donc un « élément
structurant » (Charlap, 2015) du système de pensée. Selon qu’une femme soit
menstruée, ou non, fertile ou non, le traitement social n’est pas le même.
Cependant, il ne faut pas voir le statut de la ménopause comme le seul
élément déterminant dans la position sociale d’un individu. Comme le démontre
les études de Margaret Lock, il est nécessaire d’analyser ce moment de la vie en
le reliant à d’autres facteurs individuels et culturels, et dans un contexte social
précis.
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