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TÉTOUAN
Tétouan (anciennement Tamuda), détruite par les Espagnols en 1399, est reconstruite à la fin du 15è siècle grâce à l'arrivée de juifs et de
musulmans fuyant l'Inquisition. La communauté juive de la ville a donc la particularité d’être entièrement séfarade et hispanophone comme
en témoignent la majorité des grandes familles de Tétouan: Abudaraham, Almosnino,Bendelac, Bibas, Cazès, Coriat, Crudo, Falcon, Hadida,
Nahon, Taurel..
Développement économique et rayonnement spirituel
Cette communauté se développe et s'épanouit au cours du 16è
siècle, participant très activement à la prospérité de Tétouan qui
devient alors un important port d'échanges, un des principaux
centres de commerce avec l'Occident et le siège des ambassades
étrangères. De nombreux juifs jouent un rôle majeur dans la vie
commerciale de la cité et multiplient les contacts avec l'Empire
ottoman (la Palestine en particulier), le Maghreb, Livourne,
Londres, Am-sterdam, Gibraltar et, bien sr, avec l'Espagne.
Vers la fin du siècle, elle accueille des marranes portugais ainsi
que des juifs venus d'autres villes du Maroc et elle poursuit son
développement.
La communauté de Tétouan est également rayonnante sur
le plan spirituel.
En 1530, R Hayyim Bibas, arrivé à Fez alors qu'il était encore enfant, avec sa famille fuyant l'Inquisition
espagnole, est invité à venir la diriger. Quelques années plus tard, il fonde avec son fils une yeshivah qui
deviendra célèbre dans toute l'Afrique du Nord et même au- delà. Même si la splendide synagogue de
Bibas est détruite lors de la rébellion de 1610, on compte sept synagogues à Tétouan en 1727. Au 19è
siècle, la communauté de la ville vénère le dayyan R.Isaac ben Walid, auteur de Va Yomer Yitzhak qui
constitue une source de renseignements extrêmement précieuse sur l'histoire sociale, économique et
religieuse de juifs de Tétouan. Cet érudit sera l'un des plus grands soutiens de l'entreprise scolaire de
l'Alliance.
L'ambiguïté des autorités
Les 17ème et 18ème siècles sont marqués par une politique ambiguë des autorités vis- à - vis des juifs.
Le sultan leur impose de très lourdes taxes et nombre d'entre eux sont victimes des violences anti-juives
qui se déchaînent en 1655. Mais d'autre part, lorsque tous les représentants d 'étrangers sont expulsés de la
ville, en 1772, des juifs deviennent représentants consulaires de divers pays européens et sont donc, même
indirectement, des interlocuteurs du pouvoir. En 1790 portant, de nouvelles exactions ont lieu contre des
habitations juives. L'année 1808 marque une date clé, puisqu'un décret d'expulsion de tous les juifs de la
Synagogue de Tétouan
ville est promulgué, afin de faire de Tétouan une cité exclusivement musulmane.
Une délégation de la communauté se rend à Fez pour tenter de plaider sa cause, mais elle obtient
seulement l'autorisation pour les juifs de construire leurs propres quartiers en dehors des limites de la
ville : c'est le début du développement de la Juderia, le quartier juif de Tétouan.
Bengualid Isaac grand
rabbin de Tétouan
La ségrégation spatiale s'accompagne de mesures de marginalisation
sociale et professionnelle puisque certains métiers sont désormais
interdits aux juifs, contraints par ailleurs de porter un vêtement
distinctif noir et fréquemment victimes de bastonnades. Ainsi privés de
ressources, les juifs de Tétouan s'appauvrissent considérablement. La
plupart des 9000 âmes qui composent la communauté au milieu du 19è
siècle sont réduites à la misère. Aussi l'émigration s'enflamme t-elle
de manière spectaculaire vers Mellila, Gibraltar, Oran, mais aussi en
direction de contrées plus lointaines : nombreux sont les juifs de
Tétouan à aller s'établir à Buenos-Aires, Rio de Janeiro, Lima ou
Cimetière juif de Tétouan Caracas...