Page 183 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France Morphiniques et médicaments de substitution
déplorables conditions dans lesquelles ils pratiquent ces injections.
Certains font de ces « shoots » une narration terrifiante : « ma tête
explose, mes yeux sont comme éjectés de leurs orbites, ma cervelle
coule dans mes oreilles » ; passons sur d’autres formulations de la
même tonalité. On pourrait croire que décrit en des termes aussi
dissuasifs (pour l’auditeur), le narrateur en serait définitivement
dissuadé. En fait, en complet décalage avec sa narration, il en
retient tout autre chose, puisqu’il éprouve la folle envie de le
revivre dès que possible.
Le comportement injecteur, par le prêt d’aiguilles et de
seringues éventuellement contaminées par le sang du prêteur, a
été grand pourvoyeur d’hépatites B, C et, pire encore, du SIDA.
C’est pour réduire cette modalité de contamination qu’a été mis en
place (à l’époque, 1987, où madame M. Barzach était ministre de
la Santé) un accès facile, voire gratuit, aux seringues et aiguilles.
Elles furent en vente libre dans les pharmacies, puis ce furent les
coffrets Stéribox (1994). Ces matériels sont délivrés gratuitement
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dans certains centres, les « dispensaires de vie » ou « boutiques ».
Ces dispositions, couplées avec une meilleure information des
toxicomanes, ont donné des résultats manifestes en matière
de réduction des risques infectieux, puisque, aujourd’hui, la
contamination VIH chez les toxicomanes, liée au prêt des
seringues, est devenue insignifiante. Elle affecte essentiellement
des toxicomanes entrés récemment dans le comportement
injecteur. La contamination par le VIH est désormais surtout
homo- et secondairement hétéro-sexuelle. Elle peut concerner
des toxicomanes qui, sous l’empire de leur drogue, donnent libre
cours à leur sexualité, sans recourir à des préservatifs. C’est
pourquoi, dans certains centres, des préservatifs sont également
offerts. Ainsi, tenter de justifier par ces contaminations l’existence
de ces salles de shoot n’est qu’un prétexte, puisque ce risque chez
le toxicomane injecteur est devenu insignifiant.
On notera que la nouvelle version de la Stéribox comporte une
cupule pour dissoudre la drogue en chauffant à la flamme d’un
briquet, ce qui est opportun pour « stériliser » le liquide à injecter ;
il comporte aussi un filtre adaptable sur la seringue, afin de retenir
(comme on l’a évoqué plus haut) les particules insolubles des
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