Page 234 - Desastre Toxicomanie
P. 234
Le désastre des toxicomanies en France Actions pédagogiques
développement des pratiques trop dynamiques de maternage.
Autrefois le bambin était traité comme la miche de pain. On ne le
sortait de la huche qu’à l’heure des repas. Il était confiné dans un
berceau fermé par des voilettes, dans une pièce calme, à la lumière
tamisée ; on le sortait peu et, quand on s’y résolvait, « pour lui
faire prendre l’air » c’était au fond d’un landau profond, couvert et
fermé. Allant d’un extrême dans l’autre, aujourd’hui, on le passe
de bras en bras ; la pièce est sur-illuminée ; les murs aux couleurs
vives sont très décorés ; une musique puissante et rythmée sert
de fond sonore ; la télévision est allumée en permanence ; il est
baladé, secoué, dans un sac à dos ou un sac pectoral, ou dans un
siège de voiture, avec de la musique ou l’audition en boucle de
« France Info ». N’y aurait-il pas une relation entre l’HADA et ce
maternage tourbillonnant ? Ne disposant pas des études permettant
de conclure, posons au moins la question. À l’âge scolaire,
les murs des salles de classe sont kaléidoscopiques, avec une
multitude d’affichages aux couleurs vives. On est loin de celles
des années 1950. La partie basse de leurs murs était d’un marron
soutenu ; seule la partie haute était de couleur crème. Une carte
de France jouxtait quelques panneaux, sur lesquels étaient écrits,
en blanc sur fond noir, des préceptes de morale ou d’hygiène,
ou des proverbes qui donnaient à réfléchir… On était loin du
bombardement de couleurs et d’images infligé actuellement.
L’imagination était sollicitée pour peupler cet environnement
pauvre et maussade. Un crayon devenait un avion, le plumier
en bois un immense bâtiment. L’esprit vagabondait, fabriquait
ses images ; il était très occupé à cela. Au sortir de l’école, après
l’étude et ses devoirs, nous étions mobilisés par des travaux variés,
au jardin, à la maison. On épluchait des pommes, on râpait des
carottes, il y avait l’apprentissage du solfège et d’un instrument de
musique, la bicyclette, la partie de ballon, le catéchisme, on servait
la messe au curé, il y avait le patronage, on donnait à manger
aux poules et aux lapins, on cueillait les fraises et autres fruits,
on écoutait Paul Anka, les Platers, les Machucombos, on lisait
Tintin et Milou, ou Spirou, ou Fripounet et Marisette, le journal
du jour (Paris-Normandie), on faisait son lit, on allait se balader à
pied jusqu’au stade ou au marché du village d’à côté, on lisait des
234