Page 49 - Traité de chimie thérapeutique 6 Médicaments antitumoraux
P. 49

1. CIBLES DES AGENTS ANTTTUMORAUX                          7

             oncogènes) de multiples dommages peuvent être infligés à l'ADN, en raison de sa réac-
             tivité. Les dénaturations les plus courantes résultent :
             - soit de l'action de radiations ionisantes ou UV ;
             - soit de dommages oxydatifs causés par les espèces oxygénées radicalaires ;
             - soit d'altérations sous l'influence d'agents chimiques exogènes.
               La persistance d'un ADN endommagé dans une cellule est à l'origine d'une instabilité
             génomique et constitue un facteurcommun retrouvé dans tous les processus cancéreux.
             Bien qu'apparemment contradictoires, deux systèmes de surveillance interviennent pour
             assurer la sauvegarde de l'information génétique :
             • en présence d'un faible niveau d'altération de I'ADN, la cellule met en œuvre divers
               mécanismes de réparation, spécifiquement adaptés au type de lésion à corriger:
               ceux-ci seront abordés dans le chapitre 42.
             • au-delà d'un certain seuil d'endommagement, les capacités réparatrices deviennent
               insuffisantes ; deux outils défensifs cellulaires sont alors disponibles et correspondent :
               - soit à l'arrêt irréversible de la division cellulaire (phénomène de sénescence) ;
               - soit à l'engagement du processus de mort cellulaire programmée (phénomène
                 d'apoptose).
               L'orientation vers l'un ou l'autre de ces processus dépend non seulement du type
             cellulaire, mais aussi de l'équilibre entre l'expression de divers oncogènes et celle de
             gènes suppresseurs de tumeurs.

             2.1.  FACTEURS IMPLIQUÉS DANS LA SÉNESCENCE
             La sénescence cellulaire est gouvernée par trois gènes principaux :
             - le gène p53 est un acteur primordial dans la protection vis-à-vis du développement
               tumoral: sous l'influence d'agents endommageant I'ADN, le produit de transcription
               (protéine p53) conduit à l'arrêt du cycle cellulaire ou à l'apoptose ;
             - le gène p21, lui-même activé par la protéine p53, constitue un régulateur clé du cycle
               cellulaire (cf. 4.2.1.) ;
             - p184, comme p53, est un puissant suppresseur de tumeurs : il intervient dans le
               blocage du cycle cellulaire en inhibant certaines kinases spécifiques (Cdk4 et Cdk6),
               empêchant ainsi la phosphorylation de Rb.
               Il apparaît que p53 et p21 sont principalement responsables du déclenchement du
             processus de sénescence, alors que p1 4semble davantage impliqué dans le main-
             tien de cet état cellulaire.
             2.2.  FACTEURS IMPLIQUÉS DANS L'APOPTOSE
             L'apoptose est un processus dont le principal facteur déclenchant est le gène p53. Il est
             très finement réglé parun grand nombre de facteurs protéiques dont les caspases (cystéine-
             aspartate protéases) sont les exécuteurs principaux. Toutefois, les mitochondries jouent un
             rôle clé dans l'orchestration du devenir cellulaire (mort, ou survie) et la réponse est détermi-
             née par la balance existant entre les divers membres de la famille Bcl-2 (B cell lymphoma),
             les uns étant proapoptotiques, alors que d'autres ont au contraire un effet anti-apoptotique.
             La figure 3 résume les deux voies majeures par lesquelles procède l'apoptose.
             2.2.1.  Voie récepteur-dépendante, ou voie extrinsèque
             Cette voie passe obligatoirement par un récepteur membranaire et nécessite l'interven-
             tion d'un signal proapoptotique. Parmi les signaux induisant la mort cellulaire, l'exemple
   44   45   46   47   48   49   50   51   52   53   54