Page 230 - Chimie organique - cours de Pau 2- Brigitte Jamart
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Chapitre 9 ■ Les alcènes
Exemple
2-Chloropropane
CH,+ HCI ,CI
CH, CH= ±» CH, CH, CH, 1-Chloropropane
Propène
On obtient un mélange des deux dérivés chlorés, mais le 2-chloropropane y est très majoritaire. On
dit que la réaction est régiosélective (elle serait « régiospécifique » si l'on obtenait exclusivement l'un
des deux dérivés chlorés).
La règle de Markownikov
La régiosélectivité de cette réaction est connue depuis très longtemps et, dès 1869, le chimiste russe
Markownikov avait pu énoncer, comme une règle purement empirique, que lors de l'addition d'un
composé hydrogéné AH sur un alcène dissymétrique « l'hydrogène se fixe sur le carbone le moins
substitué (ou le plus hydrogéné) ». Formulée ainsi, cette règle connaît un certain nombre de contre-
exemples et l'explication, ou la prévision, du sens de l'addition doit être recherchée en se référant,
plus fondamentalement, à son mécanisme.
Les deux étapes de l'addition de HCl sur le propène, et l'obtention possible de deux dérivés,
chlorés, se schématisent ainsi :
L'orientation de la réaction « sejoue» dans sa première étape, qui est l'étape cinétiquement déter-
minante, et résulte du « choix » fait par H de se fixer sur l'un ou sur l'autre des carbones éthyléniques. 2
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Il en résulte en effet la formation de l'un ou l'autre des deux carbocations (a) et (a), qui ne peuvent
ensuite que conduire, respectivement, aux composés (b) et b').
Ces deux carbocations n'ont pas la même stabilité : (a), qui est secondaire, est plus stable que (a') qui
°
est primaire (tableau 5.1, p. ll5). En conséquence, l'énergie d'activation de la formation de (a) est plus
chap. 5,
faible que celle de la formation de (a'), et la formation de (a) est plus rapide que celle de (a'). En défini- § 5.2.3
tive, la formation de (b) est plus rapide que celle de (b'), et (b) se forme en plus grande quantité que (b').
Puisque l'orientation de la réaction se détermine au moment del' attaque de H sur l'un ou l'autre
des deux carbones éthyléniques, c'est-à-dire dès la première inter-action entre les réactifs, on peut
s'étonner qu'elle soit influencée de manière anticipée par la stabilité d'un intermédiaire qui ne se
formera qu'ultérieurement.
Pour surmonter ce paradoxe apparent, il faut avoir à l'esprit l'allure des profils énergétiques des
deux réactions possibles [figure 9.2]. L'intermédiaire le plus stable (cation secondaire), qui corres- 2
chap. 5,
pond au « creux » le plus bas, est aussi celui qui se forme avec la plus faible énergie d'activation. § 5.5.1
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