Page 620 - Chimie organique - cours de Pau 2- Brigitte Jamart
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Chapitre 26 ■ Les grandes classes de réactions
c) Prévision du déroulement d'une réaction
On peut utiliser ces données pour prévoir le résultat d'une réaction. En effet, en plus de permettre de
classer des entités en fonction de leur dureté, la théorie HSAB énonce également que les associations
entre les acides et bases de dureté voisine sont favorisées.
Si une molécule possède plusieurs sites de réaction pouvant être classés selon les critères de la
théorie H.S .A.B., il sera possible de prévoir le résultat de la réaction de cette molécule avec un réactif
donné.
Exemple
Les ions thiocyanates SCN possèdent, de part la résonance, deux sites potentiels pouvant attaquer
un électrophile. En effet, la charge négative peut être portée par le soufre qui est un gros atome ou par
l'azote plus petit. D'après la théorie HSAB, il est possible de dire que le soufre est plus mou que
l'azote.
Comparons maintenant les deux électrophiles, CH,I et CH,COCI. Le carbone sp° du méthyle de CHI
est plus mou que le carbone sp du carbonyle de CH,COCI. En toute logique, CH,I sera plutôt attaqué
par le soufre alors que CH,COCI sera quant à lui plutôt attaqué par le site dur de l'ion thiocyanate, à
savoir par l'azote.
mou
l
mou CH, SCN
~
O CH, CO-CI S=C=N CO CH,
S=C=N
dur
dur
Compétition entre substitution et élimination
Nous avons vu au chapitre 13 que les réactions de substitutions pouvaient être en compétition avec les
éliminations. En fait, l'orientation d'une réaction vers le produit de substitution ou d'élimination
dépendra, entre autre, du rapport basicité/nucléophilie del' espèce attaquante.
Revenons tout d'abord sur les notions de basicité et de nucléophilie.
• La basicité au sens de Bronsted peut être définie comme l'aptitude d'une entité riche en électrons à
capter un proton. Le pouvoir basique d'une entité est déterminé par un équilibre thermodynamique
acido-basique.
• La nucléophilie peut être définie comme l'aptitude d'une entité riche en électrons à attaquer un
carbone. Le pouvoir nucléophile est alors déterminé par la mesure d'une vitesse de réaction, c'est
un phénomène cinétique.
• La basicité et la nucléophile sont des propriétés liées. Ainsi, on comprendra aisément que, à la fois
la basicité et la nucléophilie des anions sont supérieures à celles des molécules neutres correspon-
dantes. L'ion hydroxyde HO- est plus basique et plus nucléophile quel' eau de part la présence d'un
excès de charge négative.
En utilisant, la théorie HSAB énoncée plus haut, on peut définir que le rapport basicité/nucléophilie
sera plus grand pour des entités dures que pour des entités molles. En effet, sil' on considère la compé-
tition entre l'élimination et la substitution susceptibles de se produire au départ d'un même composé,
il est possible de classer les deux sites d'attaque, que sont le proton et le carbone, selon leur dureté.
L'hydrogène est en effet plus dur que le carbone. Ainsi, la réaction d'une base dure avec le proton sera
privilégiée alors que la réaction sur le carbone sera quant à elle favorisée par les bases molles.
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