Page 260 - 266687ILJ_CERVEAU_cs6_pc.indd
P. 260

NEURONAISSANCE
                  de notre cognition. Mais de même que nous parlons de réalité
                  augmentée, nous avons encore de grands progrès à faire dans la
                  cognition augmentée.
                    Aujourd’hui, donc, la neuroergonomie permet d’augmenter la
                  capacité de survie (survivability) des pilotes, des fantassins, des
                  commandos et des servants en mission, et, dans un monde où les
                  armes changent encore rapidement, d’accélérer leur acquisition de
                  l’expertise en réduisant leur temps d’apprentissage. L’apparition
                  de plates‑ formes multi‑ armes de plus en plus sophistiquées sur les
                  champs de bataille (drones aériens, marins et terrestres, hélicoptères,
                  etc.) implique la création de nouvelles interfaces homme‑ machine,
                  qui auront pour dénominateur commun de rendre l’information
                  plus digeste à l’esprit humain au travail.
                    Le général pourra embrasser davantage de connaissance quant
                  à l’état de ses forces et de celles de son ennemi, le fantassin (ou
                  son avatar robotique) pourra manœuvrer plus efficacement, plus
                  sûrement et plus rapidement, tandis que les interfaces qu’il portera
                  sur lui lui rappelleront certains des comportements à adopter face
                  aux multiples dangers du champ de bataille, aussi bien en combat
                  urbain ouvert qu’en mission d’infiltration. Le pilote d’hélicoptère
                  aura une perception impeccable aussi bien de ses cibles que de
                  ses menaces, il existera une course non plus à l’avionique, mais
                  à  la  neuronique,  tempérée  par  l’éternel  impératif  de  Sun  Tzu  :
                  « Connais‑ toi toi‑ même, connais ton adversaire. »

                  L’intelligence artificielle armée
                    Alors, puisque nous sommes en mesure de développer ces
                    excellentes technologies pour nous entre‑ tuer, pourquoi ne pas
                  les rendre accessibles aux civils, à d’autres fins ? Si l’intelligence
                  situationnelle relève de la politique, de la stratégie et de la tactique,
                  elle intéressera aussi bien le médecin, l’avocat, l’enseignant que
                  le soldat du feu. Je rêve d’un monde où l’armée se battrait pour
                  adapter les ingénieuses solutions de neuronique de la société civile
                  et non l’inverse ; où le génie civil serait le professeur systématique
                  du génie militaire et non l’inverse ; où le génie de la destruction
                  serait subordonné au génie de la construction. Il y aurait de la
                  sagesse en cela.


                                                                               259








         266687ILJ_CERVEAU_cs6_pc.indd   259                                     02/09/2016   14:39:04
   255   256   257   258   259   260   261   262   263   264   265