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OUI, IL fAUT TOUT ChANgER à NOTRE ÉCOLE !
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                  En 2011, Kazuhisa Shibata  et ses collaborateurs de l’université de Boston
                  parviennent à accélérer un apprentissage simple en stimulant le cortex visuel
                  primaire de leurs sujets. L’expérience est marquante. Les sujets résolvent
                  un puzzle sur écran ; on étudie l’activité de leur cortex visuel par imagerie
                  à résonance magnétique fonctionnelle (IRMf). Ensuite, on utilise l’IRM
                  pour stimuler le cortex de nouveaux sujets, qui n’ont jamais vu ce puzzle.
                  Résultat : ces sujets apprennent sensiblement plus vite à le résoudre, du
                  fait de leur stimulation en amont. On a accéléré leur apprentissage. Cette
                  technique s’appelle désormais le decoded neurofeedback (DecNef) et elle
                  est un pas décisif vers « l’impression » d’une connaissance dans le cerveau.
                  Une société de recherche privée basée à Malibu, HRL Laboratories, a
                  mené il y a peu, en partenariat avec diverses universités américaines et
                  Lockheed Martin, une étude approfondissant les travaux de Parasuraman
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                  sur l’apprentissage du pilotage . Le chercheur Matthew Phillips et son
                  équipe ont voulu savoir si la stimulation transcrânienne à courant direct
                  pouvait accélérer l’apprentissage de l’atterrissage sur simulateur. Trente‑
                  deux apprentis pilotes droitiers ont été répartis en trois groupes : certains
                  ont reçu une stimulation électrique ultra‑ précise dans le cortex dorso‑
                  latéral préfrontal (aire essentielle à la planification mentale) ; d’autres
                  l’ont reçue dans le cortex moteur gauche (qui coordonne les activités de
                  la main droite) ; les derniers ont été coiffés d’un bonnet électrique mais
                  n’ont reçu aucune stimulation. Les performances des trois groupes ont été
                  comparées sur une session d’apprentissage de quatre jours et les résultats
                  de Matthew Phillips ont confirmé ceux de Parasuraman.
                  On est donc capable d’accélérer l’apprentissage du pilotage en stimu‑
                  lant le cerveau avec une pile de 6 volts et un matériel peu coûteux
                  (quoique précis), sans danger d’usage par rapport à une IRM. Sans doute
                    pourrait‑ on en faire de même avec l’apprentissage du piano, d’une langue
                  ou des mathématiques. Cela reste à tester.



                    Peut‑ être existera‑ t‑il un monde futur où chaque fois qu’un humain
                  aura repoussé les limites connues de l’excellence dans une discipline
                  donnée, aussi bien mentale que physique, il sera possible de trans‑
                  férer tout ou partie de son expérience dans la vie mentale d’autrui,

                    1.  Shibata, K., Watanabe, T., Sasaki, Y. et Kawato, M., « Perceptual learning incep‑
                  ted by decoded fMRI neurofeedback without stimulus presentation »,  Science  (2011),
                  334, 1413‑1415.
                    2.  Choe, J., Coffman, B.  A., Bergstedt, D.  T., Ziegler, M.  D. et Phillips, M.  E.,
                  « Transcranial direct current stimulation modulates neuronal activity and learning in
                  pilot training », Frontiers in Human Neuroscience (2016), 10.

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