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Les débuts de la vie et l’enfance 197
dans la petite enfance, mais aussi stopper la transmission
intergénérationnelle des comportements agressifs. Déjà,
une étude récente a montré que l’intervention précoce dans
les interactions parent-enfant chez les familles à risque élevé
peut empêcher les agressions physiques durant la petite
enfance (Brotman et autres, 2009). Pour aller un peu plus
loin, les stratégies de prévention pourraient à l’avenir se
concentrer sur l’amélioration de la vie des femmes enceintes
qui sont à risque au début de leur grossesse (Tremblay,
2008, 2010).
7.3.3 Les comportements
prosociaux
Nous venons de parler de l’agressivité, laquelle se mani-
feste par des comportements antisociaux. À l’autre bout du
spectre, les comportements prosociaux peuvent se définir
comme des comportements opportuns, constructifs et utiles
Les jeunes enfants qui montrent le plus d’empathie pour les autres, leur but étant d’aider autrui (Eisenberg et
et d’altruisme sont aussi ceux qui régulent le mieux autres, 2006). Dans le langage commun, l’altruisme est une
leurs émotions. forme de comportement prosocial ; comme l’agressivité, c’est
un comportement intentionnel qui évolue avec l’âge.
Autour de 2 ou 3 ans, quand les enfants commencent à vrai-
ment s’intéresser au jeu avec leurs pairs, ils et elles mani-
à partir du moment de la conception et par la suite (Meaney, festent leurs premiers comportements altruistes, comme
2010 ; Shonkoff, 2010). prêter leurs jouets, aider celle qui s’est blessée, essayer de
consoler celui qui pleure, etc. (Zahn-Waxler et autres, 1992 ;
Quelle que soit la raison de leur agressivité, la plupart des Tomasello, 2009 ; Baillargeon et autres, 2011). À cet âge, les
enfants deviennent moins agressifs durant leurs années enfants commencent à développer une théorie de l’esprit et
préscolaires. Chez certains, toutefois, le modèle agressif à entrevoir que les autres ne ressentent pas la même chose
typique du début de l’enfance devient littéralement un mode qu’eux. Pourtant, ils en savent manifestement assez long sur
de vie. De nombreuses études, dont plusieurs transcultu- les émotions d’autrui pour offrir sympathie et soutien à un
relles, corroborent ces observations sur les cas d’agressivité enfant ou à un adulte blessé ou triste.
physique chronique (Hart et autres, 1997 ; Henry et autres,
1996 ; Newman et autres, 1997 ; Röll et autres, 2012). Certaines formes de comportements prosociaux, comme
attendre son tour, paraissent plus fréquentes à mesure qu’ils
Il faudrait maintenant des expériences avec des suivis à long grandissent. La serviabilité aussi semble augmenter jusqu’à
terme pour déterminer si les interventions préventives et la fin de l’adolescence. Néanmoins, les comportements pro-
correctrices précoces peuvent diminuer l’agressivité pendant sociaux n’évoluent pas tous dans ce sens. Consoler un autre
la petite enfance (Tremblay, 2010). Les mesures préventives enfant, par exemple, est un geste plus fréquent au début du
visant à modifier les effets épigénétiques qui prédisposent primaire que chez les plus vieux (Eisenberg, 2004).
certains enfants à un comportement agressif doivent se
poursuivre durant les périodes prénatales et périnatales, en La fréquence des comportements prosociaux varie beaucoup
particulier pour les mères à risque (mères qui présentent d’un enfant à l’autre. Les jeunes enfants qui montrent le plus
des problèmes de comportement à l’adolescence, qui ont d’empathie et d’altruisme sont aussi ceux qui régulent le mieux
un faible niveau d’éducation, qui vivent leur première gros- leurs émotions. Ils démontrent plus facilement leurs émo-
sesse à un très jeune âge ou qui ont souffert de dépression). tions positives et moins souvent leurs émotions négatives,
Une intervention qui commence lorsque l’enfant a plus de et ils sont plus populaires auprès de leurs pairs (Eisenberg
12 à 18 mois devrait être plus correctrice et se concentrer et autres, 2006). Ces variations dans le degré d’empathie et
davantage sur l’environnement familial et préscolaire, en d’altruisme semblent associées à un style parental qui favo-
particulier pour les familles à risque élevé (faible revenu, rise les comportements prosociaux. Enfin, les études longi-
dysfonctionnement familial, manque de stimulation ou pré- tudinales indiquent que les enfants d’âge préscolaire qui y
sence de frères et sœurs agressifs). Ces interventions précoces sont les plus enclins le demeurent à l’âge adulte (Eisenberg
peuvent non seulement réduire la prévalence des agressions et autres, 1999 et 2014).
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