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204 chapitre 7 L’âge préscolaire : développement identitaire et socioaffectif
esprit critique La fessée : oui ou non ?
Marie n’en peut plus des pleurnicheries de sa fille de 4 ans
et ne sait plus quoi faire pour y mettre fin. « Cette enfant a
besoin d’une bonne fessée ! » a lancé la grand-mère de Marie
cet après-midi au centre commercial où elles étaient allées
toutes les trois. Avant d’avoir des enfants, Marie pensait que
la fessée était hors de question et le serait toujours, mais
elle commence à se demander si le conseil de sa grand-mère
est aussi mauvais que ça. Marie a-t-elle raison de ne pas
donner la fessée à sa fille ? À court terme, la fessée convainc
habituellement l’enfant de cesser un comportement indési-
rable et réduit temporairement la probabilité qu’il le répète
(Gershoff, 2002). À long terme, cependant, les effets de la
fessée sont négatifs, bien que modestement (Ferguson,
2013). La recherche indique que la fessée :
• apprend à l’enfant qu’infliger de la douleur est un moyen
acceptable d’amener quelqu’un à faire ce que vous voulez
qu’il fasse ;
• associe le parent qui donne une fessée à l’expérience de
la douleur physique de l’enfant ;
• conduit à un climat familial caractérisé par le rejet
affectif ;
• est associée à un taux d’agressions plus élevé chez les
enfants qui ont reçu des fessées que chez ceux qui n’en
ont pas reçu.
Notons qu’au Canada, la loi interdit les châtiments physiques
En outre, certains enfants semblent être particulièrement pour les enfants de moins de 2 ans et les adolescents. Tous
vulnérables à ces effets. Par exemple, le fait d’avoir reçu des les coups à la tête et les gifles sont interdits. La punition ne
fessées avec des facteurs génétiques comme un tempéra- peut pas être donnée avec des objets comme une ceinture
ment difficile augmente de façon significative le risque qu’un ou une règle, elle ne doit pas causer de blessures ni être faite
enfant présente des troubles du comportement (comporte- de façon dégradante ou inhumaine. Ces règles s’appliquent
ment perturbateur) (Barnes et autres, 2013). Pour ces rai- peu importe les circonstances .
1
sons, les développementalistes recommandent que la fessée,
si jamais on l’utilise, soit réservée à des comportements Pour revenir à la question posée dans le titre de cette rubrique,
potentiellement dangereux pour l’enfant ou pour autrui nous devons conclure que les réserves de Marie au sujet de
(Namka, 2002). De plus, lorsqu’on administre la fessée ou la fessée sont amplement justifiées et de plus en plus sou-
toute autre forme de punition, on doit toujours expliquer tenues par la recherche scientifique et l’opinion des experts.
à l’enfant pourquoi il a été puni et le rassurer sur le fait La fessée reste un sujet d’actualité et de débat au Canada
qu’on l’aime. Enfin, les experts conviennent que les châti- et peut-être verrons-nous le gouvernement de Justin Trudeau
ments corporels ne devraient en aucun cas être utilisés pour modifier la loi pour interdire la fessée, comme l’a fait la
discipliner les enfants de moins de 2 ans (DYG Inc., 2004). Suède, par exemple.
1. Pour en savoir davantage sur les lois entourant l’autorité des parents et des enseignants
au Québec et au Canada : educaloi.qc.ca.
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