Page 36 - LOGEMENT SOCIAL ET SANTE MENTALE : LIMITES JURIDIQUES ET PERSPECTIVES
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l’auteur n’a pas commis de faute ou s’il est atteint d’un trouble psychique cela ne l’exonère pas
de sa responsabilité. Les nuisances prises en compte doivent excéder les inconvénients
normaux du voisinage (ex : tapage diurne répété). Le juge évalue les nuisances en tenant
compte de la nature, de l’intensité, de l’anormalité du trouble, du caractère continu et
permanent des désagréments. Tout en sachant que, vivre dans un immeuble collectif suppose
l’acceptation d’inconvénients considérés comme normaux. Parfois, les retentissements sur le
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voisinage peuvent être graves .
Le trouble de santé mentale, à l’origine des troubles de voisinage, ne peut pas être évoqué pour
solliciter la résiliation judiciaire du bail d’habitation. Le bailleur social doit se concentrer sur
les clauses contractuelles défaillantes et sur le non-respect des dispositions du code civil et
du code pénal. La résiliation du bail peut être obtenue suite aux conséquences consécutives sur
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le logement dont un membre du foyer est atteint d’un trouble mental .
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Un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris le 24 février 2005 indique que « si un office
public HLM remplit à l’évidence une mission sociale, il ne peut lui être demandé d’assurer la
prise en charge de personnes dont le comportement relève à l’évidence d’un traitement
psychiatrique ». Plus récemment, la Cour d’Appel de Paris du 15 décembre 2016 a
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prononcé la résiliation du bail judiciaire en s’appuyant de l’article 7-b de la loi du 6 juillet 1989
et de l’article 1184 du code civil. Les motifs retenus sont le « comportement agressif et anormal
de Monsieur…, qui frappe aux portes de ses voisins de l’immeuble, qui fume dans les parties
communes de la résidence avant de se débarrasser de ses mégots mal éteints sur les
paillassons… au risque de provoquer un incendie. Des mains courantes, des attestations
délivrées par des voisins et le courrier de la tutrice sont versées aux débats ». Par conséquent,
« le rétablissement des relations de voisinage apaisées apparaît compromis ».
Ainsi, les juges sont attachés à la réalité, à la gravité et à la persistance des troubles
allégués jusqu’au jugement. Au-delà du manquement contractuel, ils sanctionnent les
67 Un locataire atteint d’un trouble mental a été victime d’un acte de violence de la part d’un voisin excédé par
les nuisances sonores. Ce dernier a été incarcéré. Son épouse (ayant deux enfants) éprouve des difficultés
financières pour payer le loyer.
68 Arrêt rendu par la Cour d’Appel de Lyon, affaire Ribera et la Régionale Immobilière, 1 chambre civile, section
ère
B, n°1817. La résiliation du bail est prononcée à cause des retentissements sur la résidence liés au fils qui n’est
pas stabilisé psychiquement.
me
69 Arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris, affaire Chaulet et OPHLM de Bonneuil sur Marne, 6 chambre, section
B, 24 février 2005 n°04/01780
70 Arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris, affaire Nadir et la Société d’Economie Mixte Noisy-Le-Sec Habitat,
Pôle 4, chambre 4, 15 décembre 2016, n°14/21300
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