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PARTIE II
l’état d’urgence sanitaire et ses ordonnances en sont un exemple pur. Liberté des congés
payés, RTT, durée du travail, repos hebdomadaire : tant d’acquis patiemment construits
par des décennies de luttes ont été repris en un claquement de doigt et presque sans
débat . Les députés de la France insoumise ont voté contre .
Elle [la ministre du Travail] ne différencie pas dans ces fiches
les responsabilités des employeurs et des salariés. C’est très
choquant car on ne rappelle nulle part que la responsabilité
primordiale est portée sur l’employeur qui doit assumer
ses choix, y compris au niveau pénal en cas de problème
Pierre Mériaux, Syndicat SNU TEFE FSU
De plus, le ministère du Travail devait établir une liste de « secteurs d’activité particu-
lièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique
et sociale ». Non pas pour mettre à l’arrêt toutes les autres activités afin de protéger le
maximum de salariés du Covid-19 et endiguer la pandémie, comme certains de nos
voisins ont pu le faire (l’Italie et plus récemment l’Espagne), mais pour appliquer ces déro-
gations au temps de travail. Cette liste n’a jamais été établie. Pourtant, « on a besoin des
gens qui travaillent dans le logement, dans la production alimentaire et dans la santé.
Tous les autres doivent rester chez eux. L’économie doit être au service de tout le monde
et pas de quelques-uns » déclare fort justement Éric Beynel dans un article de Reporterre
du 20 mars 2020 .
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De nombreux secteurs et métiers se sont sentis lésés dans les mesures sanitaires
mises en place. Leur ressenti est le reflet concret des mesures mises en œuvre par le
gouvernement . Les salariés d’Oscaro, entreprise de pièces détachées automobiles,
l’ont démontré en cessant leur travail pour cause de « manque de protection » dans les
entrepôts. « Il y a forcément deux poids, deux mesures : la plupart des cadres restent
chez eux et télétravaillent. Mais dans les entrepôts, c’est une autre histoire pour les
salariés qui se sentent de plus en plus en danger. Un sentiment d’injustice est en train
de monter dans de nombreuses entreprises comme chez Oscaro.com », constate Hichem
Aktouche, chargé du secteur du commerce et des services au syndicat Sud Solidaires
dans un article du Parisien du 27 mars 2020 . L’illustration la plus marquante reste
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encore celle de l’entreprise Amazon condamnée par la Cour d’appel de Versailles du
24 avril à restreindre son activité « aux seules activités de réception des marchandises,
de préparation et d’expédition des commandes de produits alimentaires, d’hygiène et
médicaux ». La juridiction a, en effet, estimé que la société avait « de façon évidente
méconnu son obligation de sécurité et de prévention de la santé des salariés ». L’inspection
du travail a comptabilisé 12 millions de personnes ayant travaillé durant la période
de confinement. Concernant le recours au chômage partiel, l’inspection du travail a
également reçu plusieurs alertes pour abus d’usage. Pour autant, le contrôle par les
organisations syndicales et les inspecteurs du travail a été rendu plus que jamais
complexe. D’autant que moins de 8% des salariés sont syndiqués et le nombre de dé-
légués syndicaux a chuté de 40% depuis la mise en place des ordonnances dits Macron
du 22 septembre 2017 réformant le Code du travail.
26 / « Le gouvernement veut sauver l’économie avant les gens », Entretien avec Éric Beynel, 20 mars 2020.
27 / « Des salariés d’Oscaro cessent le travail à cause du “ manque de protection ” dans les entrepôts »,
Le Parisien, 27 mars 2020.

