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                     uniquement exportée - régulièrement mélangée avec des substances nuisibles pour la
                     santé comme l’huile de palme - dans des pays défavorisés où ces exportations détruisent
                     l’agriculture vivrière locale.

                     Que ce soit dû à des chocs sur la chaîne logistique, des chocs de demande, des chocs de
                     main d’œuvre (manque de travailleurs saisonniers…), ou à de nombreuses autres pertur-
                     bations encore (nécessité de garder ses enfants à domicile…), l’agriculture a été, au cœur
                     de la crise, durement frappée et largement laissée à l’abandon . « Au moins vous continuez
                     à fonctionner » se satisfait le gouvernement. Le 6 mai dans une interview à France Agricole,
                     Didier Guillaume expose sans détour son (absence de) vision pour l’après-pandémie :

                                Mon objectif n’est pas de mentir et de dire que tout le monde

                             va être sauvé, mais de faire en sorte que l’ensemble redémarre.
                             Toutes les entreprises agricoles et agroalimentaires ne seront
                             pas sauvées.

                             Didier Guillaume, Ministre de l’agriculture et de l’alimentation

                      Ce discours est indécent, d’autant plus après les discours de félicitations et les ap-
                     plaudissements qui se sont succédés sans vergogne. Il faut au contraire des indemni-
                     sations à la hauteur, pour qu’il n’y ait pas un agriculteur de moins à l’issue de la
                     pandémie. Il suffit d’en avoir la volonté politique pour le faire. La France peut emprunter
                     sans difficulté. Et qui plus est, il n’est pas possible cette fois-ci de se défausser sur
                     l’Union européenne. La Commission a - certes temporairement - assoupli ses règles
                     nocives sur l’interdiction des aides d’État : elle autorise un soutien pouvant aller jusqu’à
                     120 000 euros pour chaque exploitation ! Il faut faire un travail systématique d’identification
                     des besoins réels et indemniser. Rien n’empêche de sauver les agriculteurs. Nous ne
                     pouvons pas nous permettre de perdre encore des paysans . Nous en avons besoin de
                     centaines de milliers de plus qu’aujourd’hui pour continuer à nous nourrir et réaliser
                     en même temps l’indispensable transition écologique de l’agriculture.

                                Le Ministre nous a dit clairement, et je trouve ça assez

                             malheureux : vous n’avez pas trop à vous plaindre, l’activité
                             agricole continue au moins. Certes, mais avec moins
                             de débouchés ou des prix de vente qui diminuent. Malgré
                             les reports de remboursements de prêts et de charges,
                             nos coûts ne vont pas disparaître. L’agriculture qui continue
                             à tourner, heureusement, mais dans la difficulté, on doit
                             être capable de l’indemniser à la hauteur. Et à la sortie
                             de la crise, réorienter le modèle de production. Pendant
                             cette crise, mon impression est qu’il y a eu une reconnexion
                             des citoyens avec leur agriculture et leurs paysans. Si notre
                             métier doit être reconnu comme d’utilité publique, il faut une
                             revalorisation du travail, pas seulement des applaudissements
                             aux fenêtres. Si de fait ces secteurs, la santé, l’alimentation,
                             sont prioritaires, si on veut qu’ils continuent, il faut s’en donner
                             les moyens, les mettre en avant, et mieux les rémunérer.

                             Nicolas Girod, Porte-parole de la Confédération paysanne
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