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PARTIE I
Cette crise des effectifs se double par ailleurs d’une crise de management dramatique
depuis le plan Sapin de 2014 appelé « plan ministère fort » et renommé par les fonc-
tionnaires « plan ministère mort ». Cette réforme menée de façon unilatérale, sans
négociation sociale dans le ministère, a renforcé la pression hiérarchique exercée sur
les agents de contrôle via la multiplication par quatre du nombre de « petits chefs »
qui ont été nommés responsables d’unités de contrôle. Ce « coaching » néolibéral a été
très pénible pour la profession qui a une culture d’action professionnelle relativement
indépendante depuis des années. Pour finir, le ministère a souhaité renforcer la pro-
grammation de l’activité de contrôle de l’inspection du travail par des objectifs chif-
frés. Désormais il existe un plan national de contrôle, la moitié des interventions des
inspecteurs du travail doit porter sur des priorités définies par le ministère, priorités qui
sont bien loin souvent des réalités et préoccupations de terrain rencontrées par les
agents. Les inspecteurs perdent ainsi leur indépendance et droit d’initiative pourtant prévus
dans les textes de l’Organisation internationale du travail.
Les dérégulations successives du Code
du travail sont difficiles à supporter pour
les inspecteurs du travail qui sont attachés
à la protection des salariés.
Pierre Mériaux, Syndicat SNU-TEFE-FSU
Pour conclure, les différentes attaques contre le Code du travail via la loi El Khomri
de 2016, les ordonnances Macron de 2017 et la dernière loi travail de Muriel Pénicaud
ont saccagé les droits des travailleurs et ont fortement complexifié la tâche des ins-
pecteurs . Ces réformes néolibérales ont conduit à la réduction des droits des repré-
sentants du personnel à travers la mise en place du comité social et économique
(CSE) remplaçant les comités d’entreprise (CE) et entraînant la baisse du nombre de
délégués du personnel, et donc d’heures de délégation syndicale. Il en fut de même
avec la suppression des commissions d’hygiène et de sécurité des conditions de travail
(CHSCT). Il est également devenu plus difficile pour les salariés d’avoir recours tant à
l’inspection du travail dont les effectifs ont fortement baissé, tant aux conseils de
Prud’hommes dont les procédures ont été rendues plus difficiles. La primauté donnée
à l‘accord d’entreprise ou l’accord de branche sur le Code du travail, a fini de fragiliser
les droits des travailleurs. Cela a également affecté très fortement le travail des ins-
pecteurs car il est plus difficile de faire respecter les conditions de travail quand les
sources de droit sont diversifiées et que ce n’est plus la disposition la plus favorable
qui l’emporte.
Ainsi les auditionnés sont unanimes pour dire que les failles préexistantes à l’orga-
nisation du corps des inspecteurs du travail se sont révélées de manière encore plus
flagrante avec la crise du Covid-19 . Failles de trois ordres : des effectifs trop faibles ;
un management incapable d’aider les agents et qui les surcharge de demandes qui
font perdre du sens au travail et causent de la souffrance ; une déréglementation du
Code du travail qui affaiblit encore un peu plus les droits des salariés .