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                     la carte universitaire et scientifique avec 25 regroupements d’établissement de l’ESR
                     ceci en vue de « renforcer les synergies entre les acteurs et l’attractivité internationale
                     des sites », pourtant, ces regroupements ont surtout favorisé la possibilité de fusion
                     d’établissements. Ces nouveaux grands établissements créés instaurent une sélection
                     à l’entrée pour les étudiants et sont mieux dotés. La dernière loi, celle du gouvernement
                     actuel, relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (ORE), a entériné cette
                     sélection, sur dossier, et mise en place dans toutes les universités. Le cadre légal actuel
                     ne répond pas aux enjeux rencontrés par l’ESR, à savoir d’accompagner les mouvements
                     de massification par sa démocratisation de l’ESR. Il s’inscrit dans la droite ligne de la
                     compétition de chacun contre tous .



                     2 / UN SERVICE PUBLIC DE LA CULTURE DÉMANTELÉ

                     Cette crise sanitaire a permis de mettre en lumière les nombreux dysfonctionnements
                     d’un secteur culturel déjà fragilisé par les politiques d’austérité successives . Les auditions
                     menées durant cette commission d’enquête n’ont fait que renforcer ce diagnostic .


                     D’abord, la situation déjà précaire des artistes-auteurs semble plus que jamais intenable .
                     Au nombre d’environ 270 000 en France, 40% d’entre eux seraient touchés par la précarité.
                     Celle-ci est particulièrement manifeste dans les arts plastiques et visuels d’une part,
                     et dans l’édition d’autre part. À titre d’exemple, un dessinateur ou une dessinatrice de
                     bande dessinée sur deux perçoit un revenu inférieur au SMIC ; un sur trois vit sous le
                     seuil de pauvreté. Comme en témoigne l’artiste plasticienne Léa Le Bricomte lors de
                     nos auditions : « Notre statut de travailleur indépendant est déjà très précaire et nos
                     revenus sont très irréguliers. On a peu de vision à long terme même en temps normal (…)
                     c’est une économie très instable »  . Du côté des critiques d’art, le constat est identique :
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                     « Notre précarité n’est pas simplement la faiblesse des revenus, ça l’est clairement, mais
                     c’est aussi l’absence de garantie d’emploi, de sécurisation, comme tous les artistes-plas-
                     ticiens (...) et surtout l’impossibilité d’avoir une visibilité sur notre trésorerie » .
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                     Depuis une vingtaine d’années, nos gouvernements successifs ont poursuivi métho-
                     diquement une politique de désengagement de l’État vis-à-vis du secteur culturel . Ce
                     désengagement est d’abord consacré par une baisse générale des moyens accordés
                     par l’État à l’action culturelle, dans son sens large. Entre 2010 et 2020, le financement
                     des programmes culturels est passé de 8,7 à 7,5 milliards d’euros, soit une baisse de
                     13,8% en dix ans. Dans le même temps, une décentralisation au rabais a permis à l’État
                     de se défausser de ses responsabilités sur les DRAC et les collectivités territoriales.
                     L’étude  de l’Observatoire des politiques  culturelles montre ainsi  que  les budgets
                     « culture » ont baissé, entre 2016 et 2017, de 59% au sein des collectivités territoriales.

                     Mais le manque d’ambition exprimé pour la culture ne dépend pas seulement des
                     moyens financiers. Il s’explique par la récente relativisation du rôle du ministère de la
                     culture. Créé par André Malraux en 1959 pour « rendre accessible les œuvres capitales
                     de l’humanité au plus grand nombre », ses missions de service public ont été dénaturées
                     par les réformes successives de l’action publique, qui ont développé la contractualisation
                     comme mode de gestion des politiques culturelles. Dans ce contexte, bien aidé par la
                     directive européenne « Services » de 2006, le financement de l’exception culturelle a été



                     8 /  Léa Le Bricomte, artiste-plasticienne, membre du livret culture de La France insoumise,
                       audition artistes-auteurs et art contemporain.
                     9 / Florian Gaité, critique d’art, audition artistes-auteurs et art contemporain.
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